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notices bibliographiques

losophie ? Le voici, en tant qu’il m’a été donné de le comprendre. Cette philosophie est une philosophie scientifique ou expérimentale, qui part de l’expérience pour arriver aux théories ; en d’autres termes, qui part de ce qui est pour connaître ce qui fut et ce qui doit être, Je demande à l’auteur la permission de l’arrêter sur ces derniers mots. Si l’expression doit être est prise dans le sens absolu, voilà M. D. Tarrozo en contradiction avec lui-même, il est, en effet, bien entendu, que les fameuses antinomies de la raison pure n’aboutissent qu’au doute, que la certitude se résout en croyances et en probabilités, La formule est-elle prise au sens de nécessité logique, je me demande alors si cette philosophie soi-disant nouvelle n’est pas la vieille philosophie de Hume, qu’Hume lui-même n’avait pas inventée. Une seule chose me paraît dans ce livre, je ne dirai pas neuve, mais tout au moins originale : c’est la façon résolue dont notre jeune philosophe, après s’être plongé en désespéré dans le nihilisme de Hartmann, « qui doit être, pour les grands penseurs, la dernière idée du siècle », revient à la surface de cet abime métaphysique et s’encourage lui-même à vivre de cette recherche philosophique qui n’a pour objectif que des probabilités et des croyances, mais dont les résultats, idées illusoires, servent pourtant de lénitif à la douleur de vivre. Il est de ces dispositions logiques ou morales qui, si vieilles qu’elles soient, nous étonnent toujours au point de nous paraître nouvelles.

Je ne m’étendrai pas sur les considérations relatives au problème de l’existence, au dualisme, au matérialisme, au monisme, etc., toutes difficultés que M. D. Tarrozo tranche avec la décision d’un jeune métaphysicien, mais d’un métaphysicien qui paraît connaître la manière dont les maîtres de la science contemporaine ont posé ces questions. Le chapitre intitulé l’Existence est écrit avec concision et vigueur, Ceux que l’auteur consacre successivement aux mathématiques, à la chimie, à la physique, à l’astronomie, à la globologie (l’auteur a oublié de parler des autres sciences comprises dans sa classification), sont intéressants même pour des lecteurs au courant de notre littérature scientifique. Je ne doute pas qu’un tel livre n’inspire le respect de la philosophie aux compatriotes de l’auteur. Puisse la lecture de cet essai d’un jeune écrivain, œuvre pleine de promesses, où l’enthousiasme pour la science déborde à chaque page, les réveiller de la léthargie intellectuelle que M. D. Tarrozo leur reproche avec amertume !

Bernard Perez,

S. Smolikowski. Doctrina Ogusta Komta. La doctrine d’Auguste Comte. Varsovie 1881.

Descartes avait déjà fait l’observation que dans la vie d’un penseur il est nécessaire à un certain moment de faire abstraction de toute connaissance acquise. Il faut que son intelligence se trouve comme