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NOTES ET DOCUMENTS. — sur la psycho-physique

parle Zeller s’appuient sur des résultats atteints par des procédés de mesure. Il est aussi complètement erroné de soutenir que ces procédés ne sont pas applicables à d’autres qualités sensibles, par exemple aux sensations de couleur. Wundt promet de publier dans le prochain fascicule des Philosophische Studien le travail qui se fait dans son laboratoire sur le contraste des couleurs et qui repose tout entier sur des mesures.

Zeller n’a pas jugé à propos de parler des recherches relatives aux processus de perception composés, Cependant, là aussi, comme dans le cas des états psychiques élémentaires, la question de mesure se posait. Dans la théorie de la vision par exemple, les recherches sur le rapport des plus petits mouvements de l’œil avec l’acuité de la vision, sur les erreurs dans l’appréciation des distances et des directions, sur les conditions quantitatives des illusions visuelles, sont importantes[1]. Ce sont là pourtant des faits psychiques : et rechercher les changements quantitatifs que ces phénomènes subissent par la variation de leurs conditions objectives, c’est, comme pour la loi de Weber, appliquer la mesure dans le domaine psychique.

Si nous passons maintenant de la périphérie de la vie psychique aux faits internes, tout emploi du nombre et de la mesure fait défaut, d’après Zeller. On n’a pu, dit-il, déterminer exactement le nombre des actes psychiques qui se produisent dans un temps donné, ni la plus courte durée d’un de ces actes : car ce qu’on a pu mesurer tout au plus, c’est le temps nécessaire à un individu pour deux perceptions successives ou pour une perception et le mouvement qui s’ensuit.

Voilà tout ce que Zeller trouve à dire sur un point de la psycho-physique cultivé avec tant d’ardeur dans ces derniers temps. Il y a vingt ans, son objection était recevable ; mais l’auteur semble en être resté aux données qui avaient cours à cette époque et ignorer les travaux récemment faits pour éliminer ces causes d’inexactitude, travaux dont la deuxième édition de la Psychologie physiologique de’Wundt et le premier fascicule des Philosophische Studien donnent le résumé (voir le numéro précédent de la Revue, p. 332 et suiv.). Dans la philologie, l’histoire, les sciences naturelles, un auteur, avant de donner son opinion sur une question, prend connaissance de la littérature la plus récente sur le sujet ; un philosophe ne croit pas devoir faire de même. Cependant les recherches de Donders sur la détermination absolue du temps de la discrimination et de la volition sont connues en Allemagne depuis 4868 et ont été continuées depuis. Il

  1. Pour plus de détails, voir le n° précédent, pp. 349, 350.