Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 13.djvu/530

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
526
revue philosophique

assimilé à un système de corps où le principe de conservation des forces vives est applicable ; 2o prouver, par l’analyse des transformations entre la chaleur et le travail, qu’elles se terminent toujours au bénéfice de l’énergie calorique.

Sur le premier point, l’assimilation proposée exige avant tout qu’on. envisage l’ensemble de l’univers pour qu’il ne reste plus de forces extérieures au système. Or, si l’univers est infini, l’équation qui exprime la constance de la somme des deux énergies devient absolument illusoire. Chacune des deux énergies demeure en effet constamment infinie, et il n’est plus permis de leur appliquer les raisonnements faits pour des quantités finies.

Or il est impossible de démontrer que l’univers n’est pas infini ; toutes les conséquences tirées de la théorie de l’entropie restent donc soumises à une hypothèse absolument incertaine.

L’assimilation faite exigerait en second lieu, en toute rigueur, qu’il fût démontré que toutes les forces qui s’exercent dans l’univers entre les molécules matérielles dépendent exclusivement de la situation respective de ces molécules et ne sont pas autrement liées au temps. C’est à la vérité un postulatum aujourd’hui admis sans conteste par tous les physiciens. Il convient néanmoins de remarquer qu’il n’y a là qu’un postulatum, et non pas une vérité rigoureusement établie. Or tant qu’on n’aura pas examiné jusqu’à quelles limites des hypothèses contraires pourraient être formulées sans entraîner de désaccord avec l’expérience, les conclusions lointaines à tirer du postulatum dont il s’agit né peuvent avoir qu’un caractère provisoire.

Reste maintenant à aborder l’analyse des transformations entre la chaleur et le travail, telles que nous les observons dans les conditions de nos expériences ; reste à vérifier si cette analyse satisfait à la supposition de l’entropie.

Si nous revenons à notre système de corps soumis à la loi de conservation des forces vives, on peut classer suivant deux ordres tous Les changements qui surviendront dans l’état de ce système : les uns, que nous appellerons phénomènes positifs, ceux qui ont lieu dans le sens de l’entropie, qui tendent à la dissociation générale du système, à la diminution des mouvements de transfert, à la répartition uniforme de la chaleur ; les autres, phénomènes négatifs, ceux qui se produiront en sens inverse.

Clausius range dans la première classe : la disgrégation des molécules[1], la transformation du travail en chaleur, le transport de chaleur d’une source chaude à une source froide. Les phénomènes

  1. En tant qu’elle entraîne la consommation d’un travail.