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ANALYSES. — G. SALVADOR. J. Salvador, sa vie, ses œuvres.

de la critique religieuse au xixe siècle, Dès 1822, « il portait, comme le dit M. Renan, de nouvelles et bien audacieuses clartés sur les origines de la religion. » Dans ses livres : Histoire des institutions de Moïse, Jésus-Christ et sa doctrine, La domination romaine en Judée, Paris, Rome, Jérusalem, il étudie successivement l’ancienne foi et la nouvelle, et essaye de démêler leurs caractères et leur destinée. Esprit sincèrement religieux, adversaire convaincu et loyal de l’Église chrétienne, israélite tolérant et libéral, il entrevoit, à la suite de la crise actuelle, une large et profonde rénovation religieuse, réunissant en une synthèse nouvelle le déisme de la Révolution française et la Loi d’Israël. Il y a là des idées fécondes et des vues très hautes ; il valait la peine d’en revendiquer le mérite pour leur auteur. C’est ce que M. le colonel Gabriel Salvador, son neveu, a fait dans un livre récent. Cet ouvrage, où l’écrivain s’efface presque constamment, expose le plus souvent à l’aide de citations et avec une conscience méticuleuse les théories de J. Salvador et les jugements de toute sorte qu’elles ont provoqués. L’intention est excellente ; c’est à la fois un hommage et un service rendus à la mémoire d’un esprit fort remarquable. Tel qu’il, est le livre est profitable et suggestif ; il y a beaucoup à y apprendre. Pour l’intérêt de la lecture, il aurait gagné sans doute à être plus serré et moins chargé de citations (il arrive qu’on perd de vue Salvador en lisant des pages de MM. Renan ou Havet). Le style, un peu solennel, est aussi trop souvent encombré de périphrases, d’incidentes et de digressions.

C.

Edmund Gurney. — The Power of sound (Londres, Smith Elder and Co).

Ce beau livre, de 560 pages, est un véritable traité d’esthétique musicale, où M. Gurney a réuni et mis en ordre les idées qu’il avait eu occasion de publier dans différentes revues anglaises, notamment la Fortnightly Review et le Mind. L’auteur s’est proposé d’analyser les éléments généraux de la structure des œuvres musicales, d’étudier la nature, l’origine, la diversité des effets qu’elles produisent, et cela de façon à rester constamment à la portée des personnes qui n’auraient point sur ce sujet des connaissances techniques spéciales. De ces recherches, il s’efforce de déduire nettement la position que la musique occupe par rapport aux autres arts, l’influence qu’elle exerce sur les individus et les foules. M. Gurney, qui est bien de son temps et de son pays, n’a pu remplir cet intéressant programme qu’en s’appuyant sur les propriétés physiologiques des sens, démontrées par de nombreux exemples, et en analysant de très près les perceptions qui en dérivent. C’est même là ce qui donne un très vif intérêt à son livre ; on commence à être quelque peu las de ces méthodes esthétiques qui ne reposent que sur quelques vagues formules générales, comme le fameux principe de