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G. SÉAILLES. — les méthodes psychologiques

aux lois générales du mouvement qui semble le phénomène objectif partout présent. Par cela même que la psychologie est devenue une science, le problème philosophique se pose avec plus de précision. Pour la psychologie, l’esprit est un objet comme les autres, un objet à étudier en quelque sorte du dehors, un ensemble de phénomènes soumis aux lois générales de la nature : la philosophie tout entière reste donc à faire. Il reste à résoudre le problème des conditions de la connaissance, à faire la critique de l’esprit, à déterminer les catégories qui rendent la pensée possible ; il reste à répondre aux besoins métaphysiques et religieux de l’humanité, besoins qu’on ne supprime ni ne satisfait en étudiant les conditions objectives des phénomènes subjectifs ; il reste à faire effort pour rendre le réel intelligible, pour comprendre l’esprit dans sa propre nature et dans ses rapports avec le monde qu’il pense.

II

Aux trois problèmes de la psychologie expérimentale répondent trois méthodes : au sens le plus étendu du mot, ces trois méthodes sont psycho-physiques, mais la clarté du langage exige qu’on laisse à ce mot le sens spécial et précis que lui a donné Fechner. Par méthodes psycho-physiques, M. Wundt entend donc les méthodes qui se rapportent à l’étude exacte des éléments de nos représentations : ces éléments sont les sensations. Nous ne pouvons prendre pour mesure des changements internes de nos sensations que les changements concomitants des excitations externes : toutes les méthodes psycho-physiques ont donc pour objet : 1o de déterminer le minimum d’excitation nécessaire à la naissance d’une sensation ; 2o de découvrir les rapports constants entre le changement externe de l’excitation et le changement interne de la sensation. Ces méthodes sont au nombre de trois : méthode des plus petites différences (dereben mercklichen Unterschiede), méthode des cas vrais et faux, méthode des erreurs moyennes. Comme on a plus de confiance dans les moyennes résultant d’un très grand nombre d’observations que dans des observations exactes, mais isolées, on n’a accordé jusqu’ici à la première méthode d’autre rôle que celui de déterminer provisoirement les excitations ou les différences d’excitation les plus propres à permettre l’application des deux autres méthodes. M. Wundt donne une importance nouvelle à la méthode des différences sensibles qu’il met au premier rang pour trois raisons : elle est plus exacte