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ANALYSES. — A. ASTURARO. Osservazioni psico-patologiche.

qu’elle a lus (p. 16). Puis sa doctrine, l’anéantissement de la volonté humaine devant la volonté divine, se dessine peu à peu plus nettement, car la sainte, comme une femme vulgaire, à besoin du temps pour ordonner et fixer ses idées. Ces idées dominent dans ses extases et ses visions, ce plus en plus fréquentes. Le Dr Asturaro pourrait sans doute se dispenser de comparer quelques-uns des actes accomplis par Catherine pendant ces états anormaux aux faits de spiritisme et se contenter de les rapprocher des faits de somnambulisme avec lesquels, d’ailleurs, ils offrent une grande ressemblance. Aux visions de Catherine s’ajoute bientôt un très vif sentiment d’amour pour le Christ, dégénérescence de l’amour naturel de l’homme et qui produit chez la sainte les effets de la passion charnelle (pp. 28-31). Enfin l’auteur retrouve et montre dans toute la vie militante de Catherine, dans ses rapports avec les papes, les empereurs et les princes, dans ses projets de réforme de l’Église, de retour de la papauté à Rome, de croisade, de cessation du schisme, le même esprit ascétique, la même idée religieuse de travailler à la conversion et au salut des âmes ; et il fait justice du grand génie philosophique et des vastes conceptions politiques qu’on s’est plu à lui accorder.

On n’observe donc chez Catherine qu’un même état mental qui s’est maintenu, comme il s’est développé, sous une influence pathologique, à savoir l’hystérie, Et ainsi l’auteur subordonne avec raison les faits purement psychiques et tout le développement du caractère aux faits physiologiques qui produisent ce développement et dirigent le sens dans lequel il a lieu.

Rien ne vaut des monographies ainsi faites avec beaucoup d’exactitude et de sagacité (ce sont deux qualités qu’il y faut) pour prouver l’importance et l’utilité d’une méthode. L’étude du Dr Asturaro, très modérée dans l’expression, toujours respectueuse pour Catherine, n’est sans doute pas une nouveauté ; mais elle peut trouver une place à côté des travaux de M. Charcot et de l’école de la Salpêtrière qui ont montré avec clarté l’existence chez certaines hystériques de tous les phénomènes présentés par les possédées ou les saintes du moyen âge.

Dr E. G.