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que l’on invoque ? Le doute régressif de la pensée ainsi vidée de toute intuition a-t-il bien réellement des limites ? Le pyrrhonisme absolu d’un Montaigne nous semble au contraire défier toutes les ressources de la pure logique : « Il met toutes choses dans un doute si universel et si général, dit Pascal, que ce doute s’emporte soi-même, et que l’homme, doutant même s’il doute, son incertitude roule sur elle-même dans un cercle perpétuel et sans repos. » C’est que peut-être la pensée n’est liée que dans ses rapports avec des objets d’intuition donnés, mais vis-à-vis d’elle-même, des concepts et des axiomes, est liberté absolue.

A. Debon.

Alfonso Asturaro. — Santa caterina da siena, Osservazioni psico-patologiche. In-12, 48 p.  Napoli, Morano, 1881.

Cette brochure est une esquisse plutôt qu’une étude achevée de la vie de sainte Catherine. Le sous-titre en indique l’esprit.

Conformément à la méthode qui associe l’observation psychologique, dans le sens le plus complet de ce mot, à la recherche objective, c’est-à-dire, suivant les cas, tantôt à l’expérimentation physiologique, tantôt à l’observation clinique, le Dr. Asturaro remarque d’abord que, comme il s’agit de pénétrer au fond de l’âme même de Catherine pour essayer d’en reconstituer l’histoire intime, c’est une étude psychologique qu’il faut faire. Mais aujourd’hui la psychologie commence à la médecine. N’y a-t-il pas dans la conformation organique du sujet donné ou chez ses ascendants un principe physiologique qui procure, pour ainsi dire, la clef de la vie psychique ? Ici, c’est sainte Catherine elle-même, ses lettres ou ses disciples qui fournissent la réponse. L’auteur énumère alors et décrit un ensemble de phénomènes que la célèbre mystique présenta (il est loisible au médecin de les retrouver racontés çà et là par Catherine ou par ses amis et disciples) durant toute sa vie, dès l’âge le plus tendre : longs évanouissements, crises de spasmes et d’angoisse, stigmates, hyperesthésie et anesthésie, contractures, visions et extases. Donc on a affaire à une malade, et la maladie est l’hystérie. Entre autres preuves à l’appui de ce diagnostic, le D’Asturaro apporte des extraits d’une lettre écrite par Catherine à son confesseur et où la sainte décrit avec une précision étonnante deux accès, assurément hystériques pour n’importe quel médecin (p. 11-12).

Mais l’hystérie ne suffit pas à expliquer le caractère de Catherine. À la pathologie il faut joindre la psychologie : il faut voir sous quelles conditions et dans quelles circonstances s’est développé ce tempérament extrêmement nerveux pour produire une sainte. C’est sous l’influence de ces circonstances qu’apparaît l’hystérie chez Catherine (p. 15). Son ascétisme n’est d’abord que de limitation : elle répète des actes de la Vie des Pères dans le désert qu’elle a entendus raconter où