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ANALYSES. — WINDELBAND. Geschichte der Philosophie.

sait mieux que nous l’état des esprits en Allemagne ; nous devons le croire quand il dénonce l’abandon où tombent en ce pays les grandes doctrines du commencement du siècle ; mais tout le monde sait qu’en France la philosophie de Kant, presque ignorée il y a vingt ans, a été d’année en année mieux étudiée et n’a pas cessé de gagner en influence. Aujourd’hui c’est Fichte, c’est Schelling, qui, à leur tour, entrent dans nos programmes d’enseignement supérieur et passent au rang de classiques, C’est là précisément ce qui fait à nos yeux le prix et l’opportunité du volume que nous signalons : il sera un guide fort utile aux jeunes gens qui se préparent aux épreuves de l’agrégation et qui, cette année par exemple, doivent étudier le morale de Fichte. À ce point de vue spécial, il est permis de regretter une fois de plus l’absence complète de notes et d’indications bibliographiques ; nous : l’avons déjà dit, l’auteur a mis une sorte de coquetterie à faire disparaître tout l’échafaudage de son travail, Nul appareil d’érudition, peu de citations, point de renvois aux textes, Il faut suivre de confiance ; d’ailleurs, vérification faite, on le peut en général sans crainte. Un autre inconvénient, moindre peut-être, mais plus difficile à justifier, et dont j’ai peine à prendre mon parti, tant il nuit au maniement de l’ouvrage, c’est le manque de titres au sommet des pages. Ce qui rend un livre commode à consulter, ce qui fait, par exemple, de ceux d’Ueberweg et de Zeller de si bons instruments de travail, n’est-ce pas avant tout l’emploi des titres courants, grâce auxquels le lecteur n’a qu’à parcourir des yeux les têtes de pages pour savoir où il est et s’il s’approche ou s’éloigne de ce qu’il cherche ? Comment le numéro de la page, placé comme unique point de repère au milieu de la ligne supérieure, tiendrait-il lieu de cette heureuse disposition typographique ? Rien ne donne à un livre un aspect si morose et si peu engageant, surtout quand le texte est, comme ici, extrêmement compact.

Ces défauts matériels n’empêchent pas l’ouvrage d’être d’une lecture facile, si l’on ne se laisse pas rebuter : inhospitalier au regard qui ne voudrait que le parcourir, il saisit et retient l’esprit attentif qui a le loisir d’étudier. En voici l’économie. La philosophie kantienne occupe presque la moitié du volume et est exposée en cinq chapitres : le premier traite de la vie et des écrits de Kant ; le second, de son « développement philosophique » ; les trois derniers, beaucoup plus longs, de sa « philosophie spéculative, Theoretische Philosophie, » de sa « philosophie pratique », de sa « philosophie esthétique ». Nous n’avons pas encore en français une analyse suivie du système de Kant aussi complète et aussi précise. — Deux cents pages sont consacrées au « développement systématique de la philosophie allemande après Kant ». Cette étude est distribuée sous dix chefs comme voici : 1o Premiers effets de la philosophie critique ; — 2o L’idéalisme moral (Fichte) ; 3o L’idéalisme physique (Schelling et la philosophie de la nature) ; — 4o L’idéalisme esthétique (Schiller eu les romantiques) ; — 5o L’idéalisme absolu (sys-