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DU PRINCIPE DE LA MORALE

2e article[1]

IV

L’élément a priori du principe.

« Cherche ton bien dans le bien du tout auquel tu appartiens. » Tel est le précepte de la charité ; tel est aussi le conseil de l’intérêt bien entendu. On y voit la manifestation d’un sentiment aveugle ; c’est bien l’expression d’un sentiment très général, c’est le cri de l’humanité ; mais, pour être instinctif, ce commandement n’a rien d’aveugle. Il forme la conclusion pratique de tous les systèmes positifs qui aient pu se produire parmi les modernes : logiquement, nous y voyons la seule morale qui se tienne debout.

Démontrer notre principe serait le présenter comme le terme où vient aboutir toute la science, Le temps, l’espace, les forces nous font défaut pour une telle entreprise. Nous nous bornerons à l’analyser aussi distinctement qu’il nous sera possible. Enfin nous le rapprocherons de quelques principes rivaux, en marquant ce qui les unit et ce qui les sépare.

Nous avons déjà distingué dans le principe de la morale un élément a priori et un élément fourni par l’expérience. Chacun d’eux mérite un examen particulier.

L’élément rationnel, a priori, se formule ainsi : « Tu dois agir conformément à ta nature. »

L’expérience nous fait connaître cette nature, et nous résumons les leçons de l’expérience en disant : « Je suis une partie libre et responsable d’un tout, en dehors duquel mon existence est impossible. »

Pour commencer, analysons l’élément a priori ; reportons-nous par la pensée aux origines, voyons-nous naître, Et d’abord : je dois, l’obligation pure et simple. Sur ce point, l’humanité s’accorde, Sous tous les cieux, dans tous les âges, nous trouvons l’idée du devoir, la

  1. Voir le numéro de janvier de la Revue.