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VARIETES


LES SEPT ÉNIGMES DU MONDE

Dans un discours prononcé devant l’Académie de Berlin le 8 juillet 1880, lors de la séance annuelle en l’honneur de Leibniz son fondateur, M. Dubois-Reymond, discutant les objections soulevées contre le travail bien connu sur les limites de la science expérimentale[1] qu’il a lu il y a huit ans à Leipzig dans le congrès des naturalistes, a compté sept énigmes, sept difficultés qui s’opposent à intelligence du monde, difficultés dont quelques-unes pourraient être surmontées moyennant la solution des précédentes, tandis que d’autres se présentent comme absolues.

La première est l’impossibilité de comprendre la nature intime (Wesen) de la matière et de la force. C’est une borne immuable de notre savoir. Les tourbillons atomiques de sir William Thomson, pour ingénieux qu’ils puissent être, ne parviendront pas à la déplacer.

L’origine du mouvement est un second mystère : Nous voyons des mouvements commencer et finir ; nous pouvons nous représenter la matière en repos ; le mouvement nous paraît être quelque chose d’accidentel dans la matière. Notre besoin de causalité ne se trouve satisfait que par la supposition initiale d’une matière immobile uniformément répartie dans l’espace infini (?). Et, comme une impulsion surnaturelle ne saurait entrer dans notre conception, la raison suffisante du premier mouvement nous fait défaut. Nous représenterons-nous la matière comme en mouvement dès l’éternité ? Alors nous renonçons de prime abord à rien comprendre sur ce sujet. Cette difficulté nous paraît absolue, dit M. Dubois-Reymond, que nous nous bornons à traduire, en éliminant les considérations rétrospectives suggérées par la solennité du jour et les allusions aux polémiques soutenues par le savant auteur.

L’origine de la vie forme le troisième nœud. Contrairement à une opinion accréditée, l’illustre académicien ne tient pas celui-ci pour insoluble de sa nature, Une fois que la matière a commencé de se mouvoir, des mondes peuvent surgir. Moyennant des conditions propices, que nous ne saurions reproduire, pas plus que nous ne pouvons reproduire

  1. Naturerkenntniss.