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B. PEREZ. — facultés de l’enfant

ovale allongé, bien qu’il soit distinctement plus large dans les régions frontale et pariétale que chez le fœtus de sept mois représenté par Gratiolet… D’après S. van der Kolk et Vrolik, il semble que, par leur proportion relative, les lobes cérébraux d’un enfant nouveau-né tiennent le juste milieu entre ceux du chimpanzé et ceux de l’homme adulte. Mais, chez l’orang adulte, il existe la même proportion entre les lobes cérébraux que chez l’enfant nouveau-né… Le cervelet est relativement petit chez l’enfant nouveau-né… Ceci est dû à ce que, chez l’homme, l’accroissement total du volume du cerveau est beaucoup plus considérable que celui du cervelet[1]. »

La connaissance anatomique et histologique du cerveau fœtal ne permet donc encore à la psychologie première que des hypothèses sur les fonctions attribuées au cerveau de l’adulte. On sait d’ailleurs combien les physiologistes sont loin d’être d’accord sur la localisation de ces diverses fonctions. J’ajoute qu’ils ne peuvent soumettre les nouveau-nés de notre espèce à des expériences meurtrières d’intoxication et de vivisection ; nous n’avons par conséquent que peu de chose à apprendre, au moins pour le moment, d’enquêtes directes sur les fonctions cérébrales du jeune enfant et, à plus forte raison, du fœtus. Tout au plus, comme nous le montrerons plus loin, la psychologie infantile pourra-t-elle trouver quelques informations indirectes dans leurs expériences sur des animaux nouveau-nés. Chaque âge a sa psychologie comparée.

Pour le moment, et d’après l’analogie la plus superficielle, croyons que, longtemps avant de naître, l’enfant a fait connaissance avec le bien-être et la douleur, autant que ses organes de plus en plus développés ont permis passage aux impressions qui, normalement, les produisent. Il a éprouvé aussi un grand nombre de sensations modérées, en quelque sorte indifférentes, mais qui ont eu quelque écho dans sa conscience déjà formée. La plupart de ces sensations, nées sans le concours des actions cérébrales supérieures, sont confuses et indistinctes. D’autres sont plus nettes et aboutissent à de véritables rudiments de perceptions, perceptions diffuses, sans objet localisateur, sans autre lien qui les rattache entre elles que ce sentiment obscur et permanent de la personnalité intime qui réside en je ne sais quel réduit mystérieux de l’encéphale. Ce sont des perceptions comme intérieures et subjectives. Nous aurons occasion de revenir sur la nature des perceptions pendant la vie fœtale, en parlant des perceptions du nouveau-né.

  1. Le cerveau, organe de la pensée, chap. XIX, t. II, pp. 1-13.