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aussi qu’il ne s’agit pas d’une parodie des mathématiques, mais de la traduction des signes algébriques en langage ordinaire, et d’un essai d’arriver par raisonnement logique aux mêmes résultats que par les règles machinales du calcul algébrique. Mais tout cela n’est pas encore formulé en système d’école et pour cela — quoique inauguré déjà par Laplace (p. 102) — paraît étrange aux savants positivistes d’aujourd’hui. J’ai l’honneur d’être, etc.

Schmitz-Dumont.
Monsieur et cher Directeur,

Il m’est facile de répondre à la lettre de M. Schmitz-Dumont.

Quand, à des formules exactes, on en substitue, pour la facilité des calculs, d’autres plus ou moins approchées, il est indispensable : 1o d’en avertir le lecteur ; 2o de discuter les limites des erreurs que peut occasionner l’emploi de ces formules. M. Schmitz-Dumont ne l’avait point fait, et il a reconnu lui-même cette inadvertance (Versehen) dans un placard récemment publié par son éditeur. La question a d’ailleurs été examinée plus à fond dans la récension de son ouvrages que M. Lasswitz a donné dans les Göttingische Gelehrte Anzeigen du 2 novembre 1831.

Je me plais à reconnaître que l’emploi des formules exactes ne conduirait pas à modifier sensiblement les principales conclusions de l’auteur, Dans le cas contraire, j’aurais insisté sur les erreurs dont ces conclusions se seraient trouvées entachées. Mais j’ai voulu spécialement appuyer sur la nécessité d’observer rigoureusement les règles du travail scientifique dans une œuvre comme celle qu’essayait M. Schmitz-Dumont ; c’est qu’à mes yeux la stricte observation de ces règles est une condition essentielle pour le succès d’un livre de ce genre, quelle qu’en soit d’autre part la valeur intrinsèque.

Quant à l’expression dont je me suis servi à propos d’un passage de la section B, malgré sa vivacité, je ne crois pas non plus devoir la retirer. L’auteur que j’ai critiqué avoue lui-même que sa tentative de raisonnement logique n’est pas encore réduite aux formes d’un système d’école. Mais n’était-ce pas à lui à opérer cette réduction ? N’y a-t-il pas aussi des règles pour la logique comme pour le calcul algébrique ? et comment ne point trouver étrange qu’un penseur ne veuille pas s’y astreindre, pour profond et subtil qu’il puisse être ?

Agréez, etc.

Havre, le 16 décembre 1881.
Paul Tannery.


Le Propriétaire-Gérant,
Germer Baillière.