Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 13.djvu/105

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
101
revue des périodiques italiens

ports entre la philosophie et les sciences, si toutefois, dit l’auteur, elle est destinée à vivre dans un pays où la culture philosophique se tient de parti pris en dehors de toute culture scientifique et où la science se montre, en général, assez hostile à la philosophie.

Nous ne pouvons que souhaiter à cette revue nouvelle de vivre longtemps, car elle promet d’être très intéressante, et elle rendra certainement de réels services à la philosophie.

R. Ardigò. L’individualité dans la philosophie positive.

Toute connaissance, pour la philosophie positive, dérive de la sensation. À quoi les métaphysiciens font une objection tirée de l’idée de l’individualité caractérisant la conception du moi, et qui accompagne aussi les représentations distinctes des choses ou des objets. Comment donc expliquer l’individualité ? Par quoi deux objets donnés, présentant des caractères identiques, se différencient-ils cependant l’un de l’autre ? et pourquoi peut-on dire que l’an n’est pas l’autre ? Est-ce par la substance inconnaissable ? Non, répond Ardigò. Bien loin que ce qu’on appelle la substance soit l’essence des choses, elle n’est qu’un caractère tout extérieur, qu’une marque distinctive qui nous permet de ne pas les confondre : elle ne tient en rien à la nature intime des choses.

Tout fait est le résultat d’une série infinie de faits antécédents qui l’ont produit, et on peut retrouver en lui l’écho de tous ces faits. Nous apparaît-il, c’est en une sensation, laquelle est liée à une infinité d’états de conscience antérieurs ou simultanés. En sorte qu’un phénomène quelconque est déterminé par l’intersection de deux lignes indiquant ces deux séries de faits et d’états de conscience. Ainsi s’explique comment deux objets A et B présentant, pris en eux-mêmes, des caractères identiques, nous apparaissent cependant comme différents, comme deux individus distincts, Cette différenciation est due à la position relative du point d’intersection par rapport aux autres points des deux lignes. C’est donc par suite d’un caractère tout extrinsèque, tout extérieur, que deux objets nous paraissent et sont en réalité deux objets distincts. Il n’est pas besoin de supposer là une substance inconnaissable, d’aller chercher un terme dépassant l’expérience.

Sergi. Le sens des couleurs dans la perception.

Tous les objets nous apparaissent comme une étendue colorée, et c’est le mouvement associé à la sensation de couleur qui nous en donne l’idée, De là il résulte qu’un nombre considérable d’idées dérivent de la perception de la couleur des objets, d’autres de leur mouvement. Ou bien encore, en associant la couleur des objets et leur mouvement, nous nous les représentons comme de la couleur qui se meut, comme un mouvement de couleur, et ainsi la lumière subjective crée un monde d’idées, comme la lumière objective crée un monde de formes organiques dans le règne animal et dans le règne végétal (Grant-Allen).

Le langage étant l’expression de la pensée, on doit y retrouver la preuve de cette assertion. L’auteur montre en effet par l’examen de