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CORRESPONDANCE. — Dr Jacoby. La sélection et l’hérédité.

utilisé le beau travail de M. de Candolle. Le livre de l’illustre professeur de Genève avait paru vers la fin de l’année 1872, et je n’en ai eu connaissance qu’au printemps 1873, quand mon manuscrit était déjà terminé, puisqu’il devait être présenté à l’Académie de Madrid avant le 1er septembre de la même année. Pour profiter de l’Histoire de la science el des savants, il m’aurait fallu changer complètement la charpente même de tout mon ouvrage, ce qui était matériellement impossible et ce qui d’ailleurs ne serait pas même particulièrement utile, puisque mon ouvrage ne s’occupe que d’un côté tout spécial de la question, si magistralement étudiée dans son ensemble par M. de Candolle.

Je pouvais encore moins, dans un travail fait en 1873, utiliser l’ouvrage de M. Wiedemeister, paru en 1875, c’est-à-dire deux ans plus tard[1]. J’aurais pu mentionner au moins les ouvrages qui avaient précédé celui de M. Wiedemeister sur cette question, et cela en Allemagne même, à commencer, si vous voulez, par le beau roman Verlorene Handschrift, où sont très nettement exposées les idées sur le Kaiserwahnsinn des empereurs romains. J’aurais pu aussi indiquer au moins en note le travail de M. Wiedemeister, comme j’ai indiqué plusieurs ouvrages parus après 1873 ; je ne l’ai pas fait, et voici pourquoi :

En 1873, j’écrivais (p. 492 de mon livre) que dans un travail ultérieur j’exposerais en détail les raisons qui me font regarder le crime habituel comme une manifestation de l’atavisme ; or, depuis, Lombroso d’abord, puis d’autres auteurs italiens, ont soutenu cette thèse avec beaucoup de force el de grands développements ; j’ai donc été devancé, et je devais reconnaître. Il en a été de même de plusieurs autres points, à propos desquels je cite des travaux postérieurs à 1833 ; mais ces points n’ont qu’un rôle très secondaire et sans aucune importance dans mon ouvrage, et c’est pourquoi j’ai cru pouvoir ajouter quelques lignes de texte et quelques notes.

La question se présente tout autrement quand il s’agissait du fond même de mon travail, Un mémoire présenté au concours, surtout s’il a été l’objet d’une distinction, n’appartient plus exclusivement à son auteur, et il est d’usage et de tradition de le publier tel qu’il avait été présenté, en tout cas sans y faire de changements essentiels. Je me croyais donc en droit de profiter des travaux postérieurs pour des questions de détail, non pour celles qui font le fond même de l’ouvrage. Puis je dois dire que je ne partage pas les idées sur le Cæsarenwahnsinn, ainsi que je le dis dans mon livre (pages 294 et 296), et, si je n’ai nommé aucun auteur, c’est pour n’avoir pas à discuter à fond ses idées ; mon livre est déjà bien assez long, et d’ailleurs on a

  1. Je dois faire la même réponse à des reproches analogues qui m’avaient été faits, comme de n’avoir pas profité d’un ouvrage de Hæckel, postérieur de plusieurs années au mien. J’ai eu tort de ne pas avoir publié mon livre dès 1874. D’ailleurs mon ouvrage a été publié en extrait dans les Actes de l’Académie de médecine de Madrid en 1874.