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ANALYSES. — PIRMEZ. Forces de gravitation et d’inertie.

cable à priori que la communication à distance, l’hypothèse des forces agissant dans ces dernières conditions subsisterait sans difficulté, s’il n’y avait pas désormais à expliquer les transformations que subissent entre elles les diverses forces de la nature et à les ramener à l’unité dont la recherche s’impose à la science. Pour donner un substratum objectif à cette unité, on est presque fatalement conduit à dépouiller les atomes matériels de ces propriétés qu’on leur attribuait et à les transporter à un milieu où se meuvent ces atomes. C’est la position prise par M. Hirn, qui voit ainsi dans la force une manifestation d’éléments distincts des atomes.

On peut au contraire, comme l’a fait Secchi, dénier à la force toute réalité objective, et ne reconnaître que la matière et le mouvement, transmissible au contact. La force n’est plus alors qu’une pure abstraction, ou plutôt une véritable création de l’imagination dont on fait usage pour simplifier l’exposition des lois de cette transmission du mouvement. Analytiquement d’ailleurs, on retombe nécessairement sur les problèmes posés dans l’hypothèse de M. Hirn, puisque les molécules des corps naturels sont toujours supposées se mouvoir dans un milieu exerçant une action sur elles, et que la question de savoir si ce milieu est, en dernière analyse, composé ou non des mêmes éléments que ces molécules, n’a qu’une importance secondaire pour les considérations mathématiques.

On a donc, dans les deux cas, à déterminer les propriétés à attribuer à ce milieu hypothétique, l’éther, pour arriver à l’explication des phénomènes observés sur les corps naturels. La seule différence sera que dans une des thèses la détermination de ces propriétés semblera épuiser le problème posé, que dans la seconde il resterait encore à les expliquer par les communications au contact du mouvement entre les particules ultimes du milieu.

Or, jusqu’à présent, on n’a guère pu, pour la détermination des propriétés du milieu éthéré, procéder autrement que par hypothèses, et il se trouve que ces hypothèses sont passablement contradictoires. Une des principales difficultés qui se présentent est relative à l’action à attribuer à ce milieu sur les mouvements commencés dans son sein ; pour préciser un problème des plus graves, si l’on donc l’éther des propriétés élastiques qui paraissent nécessaires pour expliquer le phénomène de l’attraction universelle, ces propriétés semblent telles qu’il faudrait lui attribuer en même temps une résistance au mouvement croissant avec la vitesse, conclusion en désaccord complet avec les observations astronomiques.

Pour résoudre cette difficulté, M. X. Kretz, dans son opuscule Matière et éther[1], a eu recours aux considérations suivantes : En mécanique rationnelle, on suppose que les points matériels se meuvent dans le vide absolu, et on admet comme premier principe, dit d’inertie, que

  1. Paris, Gauthier-Villars.