Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 12.djvu/570

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
566
revue philosophique

cas, ce ne serait pas l’électricité, mais la substance blanche excitée, qui mettrait en jeu l’activité épileptogène des cellules cérébrales. Le tétanos observé serait alors un tétanos dû au retentissement de l’excitation des fibres nerveuses sur les cellules nerveuses. On peut donc supposer qu’en électrisant l’écorce du cerveau on n’agit pas directement sur la substance grise, mais indirectement, par l’intermédiaire de la substance blanche sous-jacente. De même aussi la réaction secondaire de la cellule nerveuse, exerçant une sorte d’action inhibitoire sur la substance blanche, pourrait ralentir le mouvement, si tant est que ce mouvement soit aussi considérablement ralenti que cela a été indiqué.

Quoi qu’il en soit de ces diverses objections, elles ne me paraissent pas suffisantes pour renverser les résultats importants des expériences de MM. Franck et Pitres, et il faut regarder comme assez vraisemblable l’hypothèse de l’excitabilité directe des cellules grises du cerveau par l’excitant électrique.

Et cependant il y a un antagonisme remarquable entre la résistance du cerveau aux excitations physiques directes, d’une part, et, d’autre part, sa sensibilité extrême aux excitations physiologiques, c’est-à-dire aux excitations transmises par les nerfs périphériques. Ce contraste existait déjà pour les muscles, plus excitables par l’intermédiaire des nerfs que directement ; mais pour le cerveau la différence entre l’excitabilité directe et l’excitabilité indirecte est saisissante. L’excitabilité de l’encéphale à la vibration nerveuse des nerfs périphériques est extrême. Qu’est-ce qu’un poids de 1 milligramme, qu’une goutte de vinaigre, qu’une faible lueur, et toutes excitations qui peuvent stimuler, et pendant longtemps, l’activité du cerveau ? Ne sont-elles pas mille fois plus faibles que la grande quantité de force électrique nécessaire pour mettre en jeu directement l’activité des circonvolutions cérébrales ?

Une autre condition, bien mal étudiée encore, augmente énormément l’excitabilité du cerveau : c’est l’inflammation. Le cerveau enflammé réagit aux moindres excitants, même aux excitants mécaniques, comme l’a montré M. Couty. L’organe est alors devenu tellement excitable que les convulsions et les attaques épileptiques, comme par exemple celles qui se produisent dans la méningo-encéphalite, paraissent spontanées, tant la cause qui les provoque est légère. M. Brown-Séquard a aussi tout récemment appelé l’attention sur des phénomènes analogues.

Nous avons vu que nul organe plus que l’encéphale n’est susceptible d’être excité par les variations de la quantité de sang circulant dans son tissu. M. Brown-Séquard avait même pensé que l’élec-