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et en rapprochant beaucoup les deux électrodes, d’éviter la diffusion à la périphérie ; mais, de la surface grise à la couche blanche, il est presque impossible d’empêcher la diffusion de l’agent électrique. Après avoir constaté qu’une région de l’écorce grise, excitée par un courant électrique d’intensité À, donne une contraction, si l’on excite avec le même courant A la substance blanche sous-jacente, on trouvera, tantôt que l’excitabilité a diminué, tantôt, et le plus souvent, qu’elle a augmenté. Sur ce point, les opinions qui ont cours sont très variables. Hermann et Braun, en remplaçant l’écorce du cerveau par un corps inerte, comme de l’amadou ou du sang, ont vu, après l’excitation électrique de ces corps, les mêmes mouvements des membres se produire que quand la périphérie des circonvolutions est intacte. M. Putnax, et plus récemment M. Marcacci[1], ont fait à ce propos des recherches qui sont contradictoires, et que je me contente de mentionner.

Pour MM. Franck et Pitres[2], la substance grise est manifestement plus excitable que la substance blanche. Quoique d’autres expérimentateurs, comme M. Dupuy, comme M. Hermann, prétendent le contraire, il me paraît vraisemblable, d’après la manière très précise dont furent faites les expériences de MM. Franck et Pitres, que la couche corticale du cerveau est plus excitable que la substance blanche sous-jacente. Ces expériences ne doivent être entreprises que sur des animaux non anesthésiés. C’est même peut-être pour n’avoir pas toujours pris cette précaution que les résultats sont si discordants. En effet, les anesthésiques font disparaître très vite l’excitabilité de la substance grise, alors qu’ils respectent encore la substance blanche, qui conserve beaucoup plus longtemps sa vitalité. Sur un chien profondément chloralisé, j’ai constaté que l’écorce grise était à peine excitable. Il a alors suffi d’abraser avec le bistouri la mince lamelle grise périphérique pour pouvoir constater aussitôt un accroissement notable de l’excitabilité. C’est le contraire qui a lieu sur des animaux non chloralisés, au moins d’après les expériences de MM. Franck et Pitres.

Il n’en reste pas moins dans l’interprétation de ces divers faits une certaine incertitude, d’autant plus que l’ablation par l’instrument tranchant d’une portion de tissu cérébral peut provoquer des désordres locaux et diminuer l’excitabilité des parties avoisinantes. Il est certain que l’excitation électrique ne diffuse pas jusqu’au corps strié, comme on l’avait d’abord supposé, mais on peut très bien admettre

  1. Gazette médicale, fév. 1880, n° 6.
  2. Article Nerveux (Système) du Dict. encyclop. des sciences médicales, p.  384.