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CH. RICHET. — l’irritabilité cérébrale

vent appliqué du perchlorure de fer sur des plaies de l’encéphale, sans provoquer aucune réaction notrice ou sensitive de l’animal en expérience. M. Viel[1], cherchant à provoquer des méningites expérimentales, cautérisait avec du nitrate d’argent telle ou telle circonvolution, mais il n’observait jamais de phénomènes réactionnels immédiats.

Les agents chimiques sont donc impuissants à exciter la réaction du cerveau. Cependant MM. Eulenburg et Landois ont noté que l’application de chlorure de sodium sur les hémisphères fait baisser la pression artérielle. Mais il s’agit peut-être là d’un phénomène réflexe, dû à la sensibilité de la dure-mère, ou du grand sympathique qui innerve les vaisseaux de l’encéphale.

Ainsi l’excitabilité de la substance grise du cerveau par les agents mécaniques ou chimiques n’est pas prouvée, et c’est assurément le contraire qui semble définitivement démontré.

De fait, c’est presque toujours l’action de l’électricité qu’on allègue quand on veut prouver l’excitabilité directe de la substance grise corticale.

Mais l’emploi de l’électricité soulève quelques objections importantes.

Il faut d’abord que l’excitant ne soit pas trop intense. Dans ce cas, en effet, l’excitation se propage au loin et peut aller jusqu’aux corps opto-striés. Elle peut, en tout cas, se propager facilement aux régions de l’hémisphère voisines de la région excitée. MM. Carville et Durer, M. Dupuy, M. Nothnagel, en plaçant une patte de grenouille (nerf sciatique et gastrocnémien) dite galvanoscopique dans le voisinage des régions excitées par l’électricité, ont vu que la patte galvanoscopique se contracte, que par conséquent le courant électrique diffuse, dès que l’excitation portée à la surface du cerveau est tant soit peu intense.

On conçoit l’importance de cette remarque. S’il est vrai que l’excitation électrique diffuse, on ne peut pas affirmer qu’on excite les cellules grises plutôt que la substance blanche, placée quelques millimètres plus bas.

Il est bien difficile de démontrer rigoureusement qu’en appliquant l’électricité à la surface du cerveau, on excite les cellules grises, et non les fibres blanches qui accompagnent ces cellules. En effet les fibres blanches pénètrent entre les cellules de l’écorce, et vont ainsi jusqu’à la partie la plus superficielle du cerveau.

Je sais bien qu’il est possible, en employant des courants faibles

  1. Symptomatologie de la méningo-encéphalite, Thèse inaugurale, Paris, 1878.