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LA LOGIQUE DE J. STUART MILL


La Logique de Stuart-Mill est en honneur parmi nous. Traduite par M. L. Peisse, recommandée au public français par la brillante exposition qu’en a faite M. Taine dans son livre sur le Positivisme anglais, elle a obtenu un accueil qu’on pouvait à peine espérer pour un ouvrage de ce genre. Ce qui est la marque suprême et la consécration du succès, elle a été bientôt introduite dans l’enseignement : elle y fait loi ; elle complète, si elle n’a pas entièrement pris sa place, l’antique Logique de Port-Royal. Les causes de ce succès sont faciles à trouver. Sans parler de l’incontestable valeur de l’œuvre, de la précision, de la finesse, et même de la subtilité du logicien anglais, elle comblait une lacune en établissant la logique inductive, que Bacon n’avait fait qu’ébaucher. Tout imprégnée de l’esprit scientifique, pleine d’exemples empruntés aux sciences de la nature, absolument différente par l’allure générale, par le ton, par la manière de penser, des façons un peu lourdes et pédantesques de l’ancienne logique, par là même entièrement conforme aux tendances de l’esprit moderne, elle devait être accueillie en quelque sorte à bras ouverts par tous ceux qui consacrent quelque attention aux problèmes qu’elle traite. Même dans cette partie de son œuvre où il a eu des devanciers, et dont Aristote avait fait, semblait-il, son domaine inaliénable, dans la logique déductive, Stuart Mill a su garder son originalité Il refait, à vrai dire, l’ancienne logique pour la mettre en harmonie avec la nouvelle : et il procède à cette reconstruction avec une modération mêlée de hardiesse, qui rassure en même temps qu’elle séduit. Comment son livre n’aurait-il pas eu tous les attraits de la nouveauté ? Peut-être enfin sera-t-il permis de dire que la provenance étrangère de l’œuvre a été pour quelque chose dans le succès qu’elle à obtenu. On accueille volontiers, surtout chez nous, la vérité qui vient de loin, Un peu d’engouement a pu se mêler à la très légitime admiration qu’inspirait un travail