Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 12.djvu/443

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
439
ANALYSES. — JAMES SULLY. On Illusions.

ces distinctions populaires : elle n’admet aucune distinction tranchée entre la perception et le souvenir ; elle trouve dans les deux les mêmes éléments combinés d’une manière différente. À strictement parler, la perception peut être définie une opération présentative-représentative, c’est-à-dire impliquant des souvenirs. Sans entrer dans ces discussions, l’auteur se propose de prendre les notions courantes comme bases de sa classification. Même en admettant que la perception et la mémoire soient, dans leur fond, des opérations identiques, il y a généralement une délimitation assez bien marquée entre elles.

« Toute connaissance qui a quelque apparence d’être directement atteinte, d’être immédiate, évidente par elle-même, c’est-à-dire de n’être inférée d’aucune autre connaissance, peut être divisée en quatre variétés principales : perception interne, perception externe, mémoire et croyance en tant qu’elle simule la forme d’une connaissance directe » (p. 14,. Telle est la division admise par l’auteur et qui lui sert à classer les illusions.

I. L’étude sur les illusions de la perception extérieure forme près de la moitié du livre (p. 19-188). On ne s’en étonnera pas si l’on remarque que c’est l’un des points qui a été le mieux étudié par les physiciens et les physiologistes et l’une des formes de l’erreur dont il est le plus facile de donner les racines scientifiques. Nous n’insisterons pas sur cette section, qui est cependant l’une des meilleures de l’ouvrage et que l’auteur, par ses travaux antérieurs, était préparé à bien traiter,

Un travail préliminaire est consacré à la psychologie de la perception, à montrer le rôle que joue l’interprétation de la sensation brute, et le procédé de construction mentale qui s’ensuit. Deux stades sont parcourus : l’un passif ou du moins relativement passif, où l’esprit reçoit les impressions et se forme une image ; l’autre actif, où il la complète, la classe et l’interprète. C’est ce que M. Sully désigne, avec Hughlings Jackson, par les noms de préperception et de perception propre.

Les illusions sensorielles sont divisées en passives et actives :

Les illusions passives sont déterminées : 1o par l’organisme ; elles résultent soit des limites de la sensibilité (par exemple, les sensations consécutives), soit de ses variations : certains cas morbides amènent une paresthésie, c’est-à-dire un état où la qualité de la sensation est considérablement altérée ; — 2o par le milieu ; déplacement de l’organe sensoriel, fausse interprétation de la direction et du mouvement des objets ; illusion de profondeur, relief, solidité, etc.

Sous le titre d’illusions actives, l’auteur a particulièrement étudié les hallucinations.

Un chapitre complémentaire sur les rêves est particulièrement intéressant. Même après tout ce qui a été publié de nos jours sur ce sujet, l’auteur a trouvé des aperçus neufs et suggestifs. Nous signalerons particulièrement les pages consacrées à ce qu’il appelle l’ « élément lyrique dans les rêves » (p. 164 et suivantes). « La seule unité, dit-il, qui