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s’accrurent. Nous avons vu dans un chapitre précédent, à propos du régime romain en Égypte et en Gaule, que la classe des travailleurs était réduite de plus en plus à l’état d’intendance militaire permanente. En Italie, la condition à laquelle on arriva finalement fut celle où de vastes domaines se trouvèrent « livrés à des affranchis, dont l’unique préoccupation était de cultiver le sol avec la moindre dépense possible, et de tirer des travailleurs la plus grande somme de travail au prix de la moindre quantité de nourriture. »

Il est un autre exemple qui tombe sous l’observation immédiate, celui de l’empire d’Allemagne. Les traits du type militaire en Allemagne, qui étaient manifestes avant la dernière guerre, le sont devenus encore davantage. L’armée, active et passive, y compris les officiers et les fonctionnaires attachés, a été augmentée de 1,000,000 d’hommes ; et les changements opérés en 1875 et 1880, qui rendent certaines réserves plus utilisables, ont réalisé une augmentation de même importance. En outre, les petits États allemands ont abandonné en grande partie l’administration de leurs divers contingents, ce qui a rendu l’armée allemande plus consolidée ; on peut dire même que les armées de la Saxe, du Würtemberg et de la Bavière, soumises à l’inspection impériale, ont en réalité cessé d’être indépendantes. Au lieu de noter chaque année les subsides du budget de l’armée, comme c’était en Prusse l’usage avant la formation de la confédération du Nord, le parlement de l’empire fut invité, en 1871, à voter le budget annuel pour trois ans ; et, en 1874, il fit la même chose pour sept ans ; enfin, de nouveau, en 1880, l’armée se trouvant augmentée, une somme plus forte a été accordée pour les sept années suivantes ; abdications progressives des prérogatives du peuple devant le pouvoir impérial. En même temps, le fonctionnarisme militaire s’est substitué de deux façons au fonctionnarisme civil. On récompense les officiers subalternes pour leurs longs services en leur accordant des emplois civils ; les communes sont obligées de leur donner la préférence sur les civils. Enfin, un assez bon nombre de membres du haut personnel civil, ou des universités, comme des professeurs des écoles publiques, qui ont servi comme volontaires d’un an, reçoivent des brevets d’officiers de le landwehr. Les luttes dites du Kulturkampf ont eu pour effet de subordonner davantage l’organisation ecclésiastique à la politique : Des prêtres suspendus par leurs évêques ont été maintenus en fonction ; on a fait un crime à un ecclésiastique d’attaquer publiquement le gouvernement ; on a retenu le traitement d’un évêque récalcitrant ; l’État a réglé l’enseignement des ecclésiastiques, et on les à soumis à l’examen de fonctionnaires de l’État ; la discipline de