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de la philosophie, mais ce monde a des côtés divers, qu’elle ne peut ni ne doit méconnaître.

Nous avons terminé notre excursion à travers le livre de Miloslawski ; jetons-y encore un coup d’œil général ; relevons-en l’impartialité, la finesse d’observation, le calme du jugement. Nous sommes forcés cependant de lui refuser le talent d’une exposition systématique ; nous n’ignorons pas combien il est difficile d’écrire une histoire de la philosophie allemande contemporaine, mais on aurait pu en noter les différentes manifestations avec plus d’ordre et plus de système qu’il ne l’a fait. Nous lui reprochons également de n’avoir pas accordé assez d’attention aux rapports sociaux, religieux, intellectuels et politiques de l’Allemagne, ce qui l’a empêché de comprendre la raison d’être de certaines tendances philosophiques. La limite qu’il trace entre les types surannés et les types nouveaux est indécise ; le tableau qu’il nous présente est incomplet. Plusieurs « types » ont été oubliés ; l’influence dé Beneke, de Schleiermacher, de Günther, les manifestations récentes de la philosophie religieuse, n’ont pas même été mentionnées. Il paraît ignorer l’influence de l’école historique et n’a pas cité Mainländer parmi les pessimistes. Ce qui est plus extraordinaire encore, c’est qu’il ait omis un auteur aussi marquant que l’auteur de Alten und neüen Glauben, D. Strauss.

D’un autre côté, nous ne savons pas au juste si Miloslaweki a placé Lotze et Fechner au nombre des types surannés ou des types nouveaux. Il cite Lotze (p. 283) parmi ceux qui ont imprimé à la philosophie une direction nouvelle, mais au commencement il en parle comme d’un représentant de la vieille école. Si telle est la conviction de l’auteur russe, nous saurions l’accepter, car Lotze et Fechner ont bien le droit d’être considérés comme de véritables régénérateurs de la spéculation allemande.


M. Straszewski.

Benno Erdmann. — Kant’s Kriticismus in der ersten und in der sweiten auflage der kritik der reinen vernunft. — Eine historische untersuchung. — Leipzig, Leopold Voss, 1878. — Kant’s Kritik der reinen Vernunft, édition B. Erdmann, même librairie, 1878.

(Fin[1].)

II

Revenons à l’histoire. L’ouvrage de Kant était attendu en Allemagne, et surtout à Berlin, avec une impatiente curiosité, Ce fut une déception. On n’y vit qu’une lourde et inutile machine de guerre contre la métaphysique de l’école. Pourquoi cette nouvelle attaque ? demandait Feder : | y à beau temps qu’elle est morte. Les esprits les plus sérieux étaient

  1. Voir le numéro précédent.