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cinq ans. Je commençai à m’interroger sur l’origine de l’univers vers huit ou neuf ans, deux années avant mon entrée à l’institution. D’après la vue d’une carte en deux hémisphères, je me représentais la terre sous la forme de deux immenses disques juxtaposés. J’avais pour le soleil et la lune un certain respect, à cause de leur lumière et de leur chaleur. Je croyais que le soleil se couchait à l’ouest dans quelque creux, passait sous la terre par un grand tube pour reparaître à l’est. Un jour, étant aux champs, j’entendis (à la manière des sourds-muets) plusieurs coups de tonnerre. J’interrogeai l’un de mes frères, qui fit le mouvement en zigzag de l’éclair, en me montrant le ciel. J’imaginai qu’il y avait en haut quelque homme très puissant, et le coup de tonnerre m’effraya comme une voix menaçante.

« Dans l’année qui suivit mon entrée à l’institution, j’appris, mais sans les comprendre, des phrases telles que Dieu est bon, grand, etc. J’assistais au service, à la chapelle ; mais tout cela était inintelligible pour moi. Ce n’est qu’au bout de deux ans qu’une série de questions bien graduées m’amena à cette réponse Dieu a créé le ciel et la terre. » M. Porter ajoute que le développement intellectuel de Melville Ballard jusqu’à son entrée à l’institution fut aidé par certains signes qui lui permettaient de communiquer avec sa famille. Il avait un vocabulaire considérable de ces signes pour désigner les objets environnants, animés et inanimés. Les qualités se désignaient en montrant un objet par exemple pour blanc le devant de sa chemise. Le nombre de jours, c’était autant de sommeils ; les années étaient des hivers décrits par la chute de la neige, etc., etc.


M. C. Henry vient de publier un supplément à ses Recherches sur les manuscrits de Fermat suivies de fragments inédits de Bachet et de Malebranche : ce sont des corrections et des additions à ce travail. L’auteur reproduit divers documents concernant la vie administrative de Fermat, publie les annotations autographes de Malebranche à l’Analyse des infiniment petits du marquis de l’Hospital, répond à quelques critiques adressées à ses recherches sur les écrits mathématiques de Malebranche ; enfin il publie une lettre d’où il ressort qu’une méthode de décomposition des grands nombres en facteurs employée par divers arithméticiens contemporains n’est au fond que celle découverte par M. Henry dans un manuscrit de Fermat.

La librairie O. Douin vient de commencer la publication d’une Bibliothèque matérialiste, par MM. André Lefèvre, J. de Lanessan, Ch. Letourneau, Yves Guyot, A. Hovelacque, J. Vinson, Issaurat, Pommerol, etc. Le premier volume, La Renaissance du Matérialisme, par A. Lefèvre, vient de paraître. Il se compose principalement d’articles publiés dans divers recueils depuis 1867.

Le Propriétaire-Gérant,
Germer Baillière.