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J.-P. Mahaffy. — Descartes. William Blackwood et fils, Edimbourg et Londres, 1880.

Ce charmant volume, édité avec le soin particulier que les éditeurs anglais apportent en général à leurs publications, est le premier d’une série consacrée aux philosophes classiques de l’Europe moderne et qui comprendra successivement Butler, Berkeley, Fichte, Hume, Hamilton, Bacon, Hegel, Hobbes, Kant, Spinoza, Vico, etc. Ces monographies, composées par les plus éminents professeurs des universités de la Grande-Bretagne sous la direction de M. William Knight, professeur de philosophie morale à l’Université de Saint-Andrews, ont pour but « de dire au grand public, qui ne peut pas sans doute prendre connaissance de tous les ouvrages des philosophes, ce que furent les fondateurs des principaux systèmes et comment ils traitèrent les grands problèmes de l’univers ; de donner une esquisse de leur vie et de leur caractère ; de montrer comment les systèmes se reliaient à l’individualité des écrivains, en quel état les questions philosophiques leur furent transmises par leurs devanciers, quels compléments ils y ajoutèrent avant de les transmettre à leurs successeurs, et comment ils contribuèrent à l’œuvre collective et progressive de l’intelligence du monde. » « Dans chaque ouvrage, ajoute le programme général de cette publication, dont on ne saurait trop vivement souhaiter le succès, les auteurs s’efforceront de traduire la discussion, du langage des écoles trop souvent technique et qui présuppose la connaissance d’un vocabulaire spécial, dans le langage de la vie ordinaire. » En un mot, l’ensemble de ces volumes formera une histoire complète de la philosophie moderne, étudiée dans ses plus illustres représentants.

Descartes, avons-nous dit, ouvre la série. Le volume qui raconte sa vie et expose sa doctrine, orné d’un beau portrait du philosophe d’après le tableau de Franz Hals au Louvre, a été écrit par M. J.-P. Mahaffy, professeur à l’université de Dublin et auteur de La philosophie critique à l’usage des lecteurs anglais. M. J.-P. Mahaffy, dont les ouvrages n’ont jamais été traduits dans notre langue, est principalement connu du lecteur français par sa discussion avec Stuart Mill et Bain sur l’acquisition empirique de la notion d’espace. On trouvera cette discussion en grande partie reproduite dans la Philosophie de Hamilton (p. 291 de l’édition française). M. J.-P. Mahaffy n’appartient pas à l’école empirique ou associationiste ; mais il n’appartient pas davantage à l’école du sens commun, dont Hamilton essaya vainement de concilier les doctrines avec celles du criticisme. Comme M. Renouvier en France, il s’inspire des principes les plus généraux de la philosophie de Kant : c’est un néo-kantien anglais. Mais hâtons-nous de dire qu’on ne remarque dans son Descartes presque aucune trace de ses opinions personnelles.

L’ouvrage est fait pour plaire à un lecteur français. Il témoigne dans toutes ses parties d’une parfaite intelligence de la philosophie de Des-