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J. OCHOROWlCZ. — projet d’un congrès de psychologie

sence même de nos plaisirs et de nos douleurs. Le domaine de ces recherches est plus vaste qu’on ne le suppose habituellement, car elles embrassent non seulement l’expression des sentiments momentanés (voir l’ouvrage connu de M. Darwin), mais aussi l’expression plus prolongée des maux pathologiques[1]. Je ne parle pas du troisième point de vue, celui de la physiognomonie de Lavater, qui étudie l’expression, stable et pour la plupart innée du caractère, dans les traits du visage, cette dernière étant trop peu fondée comme science. On y trouvera cependant quelques propositions rationnelles, ayant rapport à l’union du physique et dû moral, surtout dans l’expression que leur a donnée C. G. Carus dans sa Symbolik der menschlichen Gestalt (Leipzig, 1852-8). La pathognomonie a été assez cultivée dans ces derniers temps, à en juger d’après le nombre des auteurs qui y ont contribué ce sont MM. Burgess, Ktasowski[2], Carus, Duchenne, Lemoine, Gratiolet, Piderit, Harless, Bain, Spencer, Darwin, Hecker[3], Hersing[4].

IX. La psychologie de l’art, c’est-à-dire l’étude des conditions psychiques qui déterminent d’une part la production des œuvres d’art, et de l’autre les sensations esthétiques qu’elle procure. C’est à ce double point de vue, que la psychologie sert de base à l’esthétique. On voit, de nos jours, un vif mouvement se manifester sur ce terrain, mouvement qui promet de réformer de fond en comble l’ancienne esthétique allemande.

Il suffit de rappeler les noms de Taine, de Dumont, Helmholtz et Brucke, Fechner, Sully et Grant-Allen. On trouverait en outre des travailleurs distingués dans les littératures slaves, qui ont la mauvaise chance de rester inconnues à la plupart des savants.

X. La psychologie de l’histoire, destinée à suppléer la philosophie de l’histoire, encore trop peu fondée de nos jours. À vrai dire, la Scienza nuova de Vico était, elle aussi, plutôt une psychologie qu’une philosophie de l’histoire, au moins dans le sens où la comprend Hegel. On devine aisément que j’entends sous ce nom toutes les vérités psychologiques concernant l’évolution mentale de l’humanité, la psyctiogénie des sciences, des arts, des religions, telle qu’elle a été tracée par Lubbock, Tylor, ou Spencer, et de l’autre côté l’éthologie des nations ou science des caractères nationaux, cultivée sous le nom de Völkerpsychologie par Steinthal et Lazarus.

  1. Voir la Physiognomie des malades [Kranken-physiognomonik] du Dr Baumgaertner, Stuttgart, 1839, avec l’atlas de 72 grandes planches coloriées, d’après nature.
  2. Auteur d’un livre russe sur la Théorie et la Mimique des sentiments, 1849.
  3. Physiologie Psychologie Lachens, 1873.
  4. Der Ausdruck der Auges, Stuttgart, 1880.