Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 12.djvu/173

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


ANALYSES ET COMPTES RENDUS



B. Perez. L’éducation dès le berceau, essai de pédagogie expérimentale. 1 vol. in-8o (viii, 302 pages). Paris, Germer Baillière, 1880.

M. Bernard Perez continue avec un zèle louable ses intéressantes observations sur le développement intellectuel de l’enfant. Son nouveau livre n’est en effet que la suite et comme l’application à la pédagogie de l’ouvrage de psychologie pure qu’il a déjà publié sous ce titre : Les trois premières années de l’enfance[1]. Ici encore, bien qu’il s’agisse d’éducation, de discipline et de direction, l’observation psychologique ne perd pas ses droits. Et il faut s’en féliciter : dans les premières années de l’enfance, en effet, le rôle du pédagogue sage est un rôle de discrétion et de réserve. La grande éducatrice à cet âge, c’est la nature même, et bien folle serait l’éducation qui, par des excitations maladroites et des répressions inopportunes, viendrait contrarier l’essor naturel du corps et de l’esprit. L’éducation au berceau ne doit guère différer et se distinguer d’une psychologie attentive et vigilante.

Ce n’est pas d’ailleurs de l’éducation de l’enfant tout entière que M. Perez nous entretient dans son nouvel essai. Il a réservé pour d’autres ouvrages l’étude de l’éducation intellectuelle ou de l’instruction, et aussi celle de l’éducation physique, Un peu trop disposé peut-être à diviser des sujets qui ne se prêtent pas à des divisions aussi tranchées, comme aussi à émietter ses idées et à particulariser ses observations, il a voulu considérer d’abord la seule éducation morale, « celle qui a pour but, dit-il, de développer et de discipliner les forces innées qui portent l’homme à l’action. »

Essayons de suivre l’auteur dans le cours de ses réflexions, en dégageant les idées principales qui dominent chaque chapitre, sans nous perdre dans le détail infini des observations et des faits,


Chapitre I. L’éducation morale des sens.

Le sujet est neuf et piquant, et nous admettons volontiers qu’il y à une éducation morale des sens, dès les premières années de la vie, c’est-à-dire une certaine direction à donner aux plaisirs et aux peines sensibles du tout petit enfant, un choix prudent à faire des sensations qui lui deviennent familières et habituelles, Ajoutons cependant que

  1. Voyez le compte rendu qui a été fait de ce premier ouvrage, dans la Revue philosophique, tome VI, pages 461-481.