Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 12.djvu/170

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
166
revue philosophique

commençait seulement à s’ébaucher. Or il n’était certes pas naturel d’adopter les épioycles pour certaines planètes, les excentriques pour d’autres, tandis que le fait du voisinage toujours constant entre le soleil, et Mercure et Vénus, l’égalité des durées de leurs révolutions géocentriques conduisaient naturellement Héraclite à essayer l’hypothèse de trois épicycles tournant autour d’un même centre, celui-ci effectuant de son côté autour de la terre une révolution uniforme dans l’intervalle d’une année solaire.

Le système d’Aristarque devait échouer d’autant plus contre la force des préjugés religieux et vulgaires qu’il n’apportait pas la simplicité complète des mouvements circulaires, concentriques et uniformes, rêvés à l’origine par les Pythagoriciens. L’imperfection des moyens d’observation faisait qu’on n’était pas encore obligé de multiplier outre mesure les épicycles et les excentriques, et la simplification apportée dans la conception générale du monde n’était pas dès lors aussi désirable qu’elle le devint avant Copernic. L’hypothèse des épicycles, adoptée par Hipparque, triompha donc pendant de longs siècles pour les diverses planètes, et l’opinion particulière d’Héraclite demeura comme une supposition plausible à certain égards, pouvant se concilier avec les théories dominantes, mais d’ailleurs sans preuves suffisantes pour en établir la vérité.

Ces aperçus sur l’histoire de l’astronomie ancienne nous ont écartés de Platon. Il est temps de revenir à lui et d’essayer de préciser les évolutions de sa pensée en ce qui concerne le repos ou le mouvement de la terre.

Il est certain que dans sa dernière œuvre, les Lois, il conforme en général son langage aux opinions vulgaires de son temps, et semble, par conséquent, considérer encore, ainsi qu’il l’avait fait dans le Timée, notre globe comme immobile, la sphère des fixes comme en mouvement. M. Th.-H. Martin a donc-pu se croire autorisé à regarder cette croyance comme un dogme platonicien.

M. Schiaparelli, au contraire, s’il répugne à admettre, ainsi que nous l’avons fait, que Platon ait connu l’ébauche de la doctrine des épicycles, pense trouver dans les Lois même : la preuve qu’a l’époque de leur rédaction l’opinion intime de notre : philosophe justifiait déjà le témoignage de Théophraste sur son revirement. Dans cette thèse, le plus plausible est de croire qu’après le Timée Platon aura momentanément adopté le système de Philolaos (la terre excentrée et décrivant un orbite), pour se rallier ensuite à celui d’Ecphante et d’Héraclite (la terre au centre de l’univers, mais animée d’un mouvement de rotation sur elle-même).

La contradiction entre la doctrine scientifique, réservée au cercle