Page:Ribot - Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome 12.djvu/110

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
106
revue philosophique

« Elle repose, dit-il, sur ce principe célèbre : Dictum de omni et nullo, principe que l’on peut formuler ainsi : Ce qui est affirmé (ou nié) d’une classe est affirmé (ou nié) de tout ce qui est renfermé, dans la classe. Ce principe, suivant Mill, répond au temps où l’on croyait à l’existence des universaux indépendants des objets particuliers. Dans cette hypothèse, le principe Dictum de omni avait une signification importante ; car il exprimait la communauté de nature qui dans cette théorie doit être supposée exister entre les substances générales et les substances particulières qui leur sont subordonnées. Que toute chose attribuable à l’universel fût aussi attribuable aux divers individus qui y sont contenus, n’était point alors une proposition identique. C’était une proposition d’une valeur réelle : car l’homme ne signifiait pas tous les hommes, mais quelque chose d’inhérent aux hommes et très supérieur en dignité à tous les individus humains. Mais maintenant qu’on sait qu’une classe, un genre, une espèce, en un mot un universel n’est pas une entité per se, mais rien autre ni plus ni moins que la somme de substances individuelles mêmes renfermées dans la classe, et qu’il n’y a de réel que ces objets et le nom commun qui leur est donné je voudrais bien savoir ce qu’on nous apprendrait en nous disant que ce qui peut être affirmé d’une classe le peut être de chaque objet contenu dans cette classe ? Le Dictum de omni se réduit donc à cette proposition identique : Ce qui est vrai de certains objets est vrai de chacun de ces objets. »

On ne peut admettre, dit encore Mill, pour échapper à ces conséquences, l’échappatoire, du Dr. Whately. Suivant ce logicien, la conclusion n’est contenue dans les prémisses que d’une manière implicite, et le raisonnement a précisément pour but de la développer, de l’en faire sortir. Mais que veut dire implicitement ? Est-ce, sans en avoir conscience, sans le savoir ? Mais n’est-ce pas là admettre un principe sans examen ? Et de quel droit affirmez-vous cette proposition générale, si vous ne savez pas ce qu’elle contient ?

La théorie habituelle du syllogisme conduisant à de telles conséquences, ou il faut renoncer au syllogisme, ou il faut renoncer à cette théorie. Mais, suivant Mill, ce n’est pas le syllogisme qui a tort : ce sont les logiciens. Il faut donc ramener la théorie du syllogisme à d’autres principes.

En conséquence, puisque le syllogisme est une pétition de principe lorsque l’on dit que la conclusion doit être contenue dans les prémisses, c’est-à-dire lorsqu’on la définit le conclusion du général au particulier, il faudra dire que la conclusion n’est pas contenue dans les prémisses, qu’elle s’y ajoute et qu’elle est une inférence du particulier au particulier.

Nous exposerons tout à l’heure plus en détail cette théorie. Bor-