Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXXI, 1891.djvu/59

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
49
b. perez. — le caractère et les mouvements

la méthode déductive ; celles de M. Ribot pour la méthode inductive, telle que la pratiquent les médecins et physiologistes contemporains. Ainsi, dans la préface du livre si riche en analyses de M. Azam[1] il déclarait que « la science des caractères ne peut procéder ni par généralités, comme la psychologie, ni par individualités, comme l’art. Elle occupe une position intermédiaire. Son objet, c’est la détermination de certaines variétés typiques et des nuances de chaque type ». On arrivera à ce résultat en substituant, comme on l’a fait, par exemple, pour l’aphasie, l’étude de divers types à telle forme de caractère prise en général. Pour arriver à « l’unité », il faut partir de « la diversité », comme nous le disions nous-mème plus haut. Je ne vois pas, d’ailleurs, en quoi cette méthode refuserait de se concilier avec celle qui prend pour point de départ les généralités acquises par la psychologie, et en fait découler de nouvelles généralités, éclairées d’un nombre suffisant de faits et d’exemples.

Maintenant, à quoi bon se poser des questions préjudicielles du genre de celle-ci : Sera-t-il jamais possible de classer les caractères comme on classe les animaux et les plantes ? Chaque matière comporte son genre de classification. La psychologie, c’est encore de l’histoire naturelle, mais d’une certaine espèce. Elle comporte évidemment de l’approximation et laisse le champ libre aux découvertes de détails, aux particularités, aux nuances. Le tout est de savoir se contenter de l’à peu près là où l’exactitude la plus rigoureuse n’est pas encore, ou ne sera peut-être jamais atteinte, surtout de présenter des cadres aussi larges et aussi simples que possible. La distinction des tempéraments, qui fut si longtemps en honneur, parut réunir ces divers avantages. Mais, même en so combinant avec la phrénologie, elle n’a pas tenu ce qu’elle promettait. Peut-être y reviendra-t-on, en la perfectionnant d’après de nouvelles données physiologiques et pathologiques ; peut-être a-t-elle décidément fait son temps. Pour le moment, les médecins eux-mêmes ne parlent que comme d’une vieillerie métaphysique, de cette hypothèse de l’action prédominante sur le moral de tel ou tel appareil jugé important, le foie, le système nerveux, le système circulatoire, la lymphe, la bile, etc. On se sert plus volontiers du terme plus vrai, parce qu’il est plus vague, d’idiosyncrasie, qui veut dire au fond k manière d’être de chacun. Nous n’en sommes guère avancés. Nous savons toujours, mais nous savons seulement ceci, que le fonctionnement, et l’on peut même dire la constitution propre du cerveau,

  1. Le Caractère dans la santé et dans la maladie.