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c’est-à-dire d’adaptation ou d’accommodation, est fort bien établie chez ces organismes rudimentaires[1].

On le voit, dans l’étude des leucocytes, comme dans celle des autres organismes unicellulaires, l’explication anthropomorphique des réactions aux excitations a fait place définitivement à une conception au fond purement mécanique des phénomènes. Qu’il s’agisse de la plus importante des réactions cellulaires de l’organisme des Métazoaires, du phagocytisme des leucocytes, de la recherche de la nourriture chez les Protophytes et les Protozoaires, ou de la direction des filaments séminaux de certaines plantes vers les cellules ovulaires, il n’est plus permis d’évoquer, pour l’intelligence scientifique de ces phénomènes, des « choix », des « instincts » plus ou moins obscurs où, même inconsciemment, on est tenté d’entrevoir la réalisation de certaines fins volontaires. L’excitabilité ou l’irritabilité cellulaire, dont la sensibilité n’est qu’un mode, suffit, comme l’a montré Charles Richet[2], à rendre raison des réactions les plus complexes des organismes aux excitations mécaniques, physiques et chimiques du milieu.

L’hydrotropisme, considéré comme une forme du chimiotropisme, a été bien observé par Stahl : il consiste dans l’action directrice, soit positive, soit négative, qu’exerce l’humidité sur l’orientation des mouvements de certains organismes, des Myxomycètes, par exemple, qui vivent dans les lieux humides, sur les feuilles tombées des bois, au milieu de la mousse[3]. Les Myxomycètes présentent précisément les deux espèces d’hydrotropisme contraires, positif et négatif, avant et pendant le stade de la reproduction.

Le trophotropisme, enfin, ou l’action directrice qu’exercent certaines substances nutritives déterminées sur l’orientation des mouvements des Protozoaires, n’est encore qu’un cas particulier du chimiotropisme. C’est ainsi que les plasmodies d’Aethalium, aux larges mailles d’un beau jaune, rampent vers les débris d’écorce de chêne dont elles se nourrissent.

  1. Cf. W. M. Hafkine, Recherches sur l’adaptation au milieu chez les Infusoires et les Bactéries. (Ann. de l’lnst. Pasteur, 1890, 363 sq.). — J. Massart, Sensibilité et adaptation des organismes à la concentration des solutions salines, I. I. p. 557. Tous les organismes ont montré de l’accoutumance aux solutions concentrées. « On peut les rendre insensibles (les Bactéries) à des solutions dont la concentration dépasse de beaucoup celles qui repoussent les Bactéries sortant du liquide de culture ordinaire. »
  2. Ch. Richet, Essai de psychologie générale, p. 20 et sq. ; Physiologie des muscles et des nerfs, 242.
  3. V. Raeckel, Le règne des protistes. Aperçu sur la morphologie des êtres vivants les plus inférieurs, pp. 56-58 de notre traduction, fig.  42 et 43.