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j. soury. — la psychologie physiologique des protozoaires

température (au-dessus de 20° et au-dessous de 30°) où ils atteignent leur maximum de netteté et de précision. Les rayons les plus réfrangibles du spectre agissent comme la lumière blanche sur l’orientation des mouvements ; l’influence des rayons les moins réfrangibles a lieu dans le même sens, mais ils sont peu ou point efficaces ; souvent ils agissent comme l’obscurité.

Les mouvements d’orientation relativement à la direction des rayons incidents dépendent encore, outre la lumière, et chez les animaux comme chez les plantes, de la forme du corps : 1o les points symétriques de la surface du corps des animaux dorsiventraux ont quantitativement la même excitabilité héliotropique ; 2o cette excitabilité est, en général, plus sensible au pôle oral qu’au pôle aboral des animaux ; 3o l’excitation de la face ventrale diffère également de celle de la face dorsale. De ces trois causes réunies résulte, pour les animaux dorsiventraux, la nécessité de placer l’axe de leur corps dans la direction des rayons et de se mouvoir vers la source lumineuse ou de s’en éloigner. Les animaux sans yeux, par exemple les larves de Musca vomitoria, les Vers de terre, etc., se comportent à cet égard tout à fait comme les animaux pourvus d’yeux. Aussi Loeb en déduit-il que la réaction héliotropique est une propriété du protoplasma (au moins chez les animaux et chez les plantes), et non une propriété des organes de la vision : le protoplasma de la rétine humaine est positivement héliotropique ; dans un œil éclairé, le pigment et les cônes rétiniens se déplacent en avant dans la direction du corps vitré ; dans l’obscurité, ils reprennent une direction opposée. Or ces mouvements d’orientation héliotropique sont propres au protoplasma du fond de l’œil ; les mouvements des grains de pigment et des cônes sont purement passifs, comme le sont ceux des grains de chlorophylle charriés par les courants de protoplasma végétal sous l’influence de la lumière (Sachs). Dans l’œil humain aussi, les rayons bleus sont plus efficaces que les rouges pour déterminer ces mouvements des cônes (Engelmann). Loeb va même jusqu’à faire dépendre de cette propriété héliotropique du protoplasma du fond de l’œil les mouvements d’orientation des yeux et de la tête, ainsi que nos sensations d’espace.

Tout protoplasma animal est donc, comme tout protoplasma végétal, héliotropiquement excitable. Quand ce mode d’excitabilité paraît faire défaut, c’est que, temporairement ou d’une façon durable, la réaction héliotropique du protoplasma subit une action d’arrêt ou d’inhibition, déterminée en général par un autre mode d’excitabilité plus puissant, tel que le stéréotropisme, le géotropisme, le thermotropisme, etc. Dans ces cas, la pesanteur, la chaleur, les sensations