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protoplasma cellulaire, et en particulier l’endoplasma, l’est beaucoup moins… Dans de nombreux cas, les cils du même Cilié ne laissent pas de présenter des différences relativement à leur excitabilité : chez les Hypotriches, par exemple, les cils du péristome sont plus excitables que les cils ventraux avec lesquels ces Protozoaires exécutent leurs mouvements de locomotion. En général, les cils du péristome, grâce à leur situation à la partie antérieure du corps, jouissent d’une excitabilité plus délicate[1]. » Voilà donc des organes à la fois de sensibilité et de mouvement. Quant aux soies, Verworn ne saurait, dit-il, concéder à Maupas, à Géza Entz et à Bütschli, que, chez les Ciliés, ces organoïdes se distinguent des autres cils par leur excitabilité, et qu’ils doivent uniquement servir d’organoïdes sensitifs pour la perception des excitations mécaniques[2]. Chez Mesodinium acarus, étudié d’une manière spéciale par Verworn, de même que chez les Acinètes, les tentacules possèdent, réunies dans un même organoïde, outre leurs fonctions d’organes de fixation et de préhension, celles d’organes de sensibilité. Bref, chez tous les Protozoaires dont les différentes parties sont inégalement excitables, c’est toujours la couche externe du protoplasma cellulaire, avec les organoïdes qui s’en sont différenciés, cils, flagellums, tentacules, qui est le siège d’élection de la plus grande excitabilité.

On le voit, aucun organe de sensibilité spéciale n’apparaît encore d’une façon certaine chez les Protozoaires, car la nature des fonctions attribuées aux taches rouges de pigment semble douteuse. Seuls, des organes rudimentaires de sensibilité générale et de mouvement se sont différenciés de l’exoplasma. Toutefois l’absence d’organes différenciés n’implique point, chez tous les Protozoaires, l’absence de fonctions correspondantes. Il en est de même chez des êtres d’une organisation bien plus élevée : les beaux travaux de R. Dubois, de Lyon, sur les fonctions photodermatiques d’animaux dépourvus d’yeux, ont démontré expérimentalement que certains mollusques acéphales perçoivent des lumières de différente intensité et de diverses longueurs d’ondes. La sensibilité des Protozoaires et des Protophytes aux excitations déterminées par les substances chimiques en dissolution dans le milieu ambiant témoigne tout à fait, selon nous, de l’existence d’une fonction élémentaire, déjà fort élaborée, qu’on

  1. Max Verworn, loc. cit., p. 128.
  2. V. Maupas, Contribution à l’étude morphologique et anatomique des Infusoires ciliés (Arch. de zoologie expérimentale, 2e sér., I, 1883, 247 sq.). Depuis la publication de ce mémoire, Maupas a pu observer, outre leurs fonctions d’organoïdes sensitifs, la fonction motrice des soies, par exemple chez les Haltéries : ce sont bien des soies saltatrices (Claparède). Locomotrices chez quelques espèces, les soies sont, chez toutes les espèces, de véritables organoïdes de sensibilité générale.