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j. soury. — la psychologie physiologique des protozoaires

mènes n’explique pas tout, sans le mécanisme et le déterminisme on n’explique rien.

Certes, et quoique la matière sur laquelle s’exerce l’esprit humain ne paraisse jamais devoir être épuisée, l’idéal que le savant de nos jours se forme de la science est bien moins élevé, ou bien moins chimérique, que par le passé. On a renoncé, en réalité, à rien expliquer. Déterminer les conditions des phénomènes et les décrire, voilà toute la science moderne. La généralisation la plus haute, celle de la conservation de l’énergie, doit suffire à nos vœux et à notre besoin de connaître. Alors même que l’édifice de la science humaine serait un jour achevé, c’est-à-dire que tous les phénomènes naturels, y compris la vie et la pensée, auraient été réduits à un pur théorème de mécanique, et qu’une équation unique aurait été trouvée pour la nature entière, le savant ne connaîtrait encore, et toujours sous la forme de purs symboles, que les relations dans la durée et dans l’espace des parties de l’être inconnu et inconnaissable qu’on appelle l’univers. Aujourd’hui, la première vertu de l’homme de science semble faite de résignation et de renoncement.

I

Quelle est, pour la psychologie physiologique, c’est-à-dire pour l’étude de l’un des aspects de la vie, la valeur d’écrits tels que ceux de Max Verworn, sur la psychologie des Protozoaires ; de Jacques Lœb, sur l’héliotropisme des animaux et des plantes ; de Pfeffer, sur les mouvements des végétaux et des protozoaires sous l’influence des excitations chimiques ; de Maupas et de Balbiani, sur la psychologie cellulaire ? Le lecteur en jugera lui-même, s’il lit l’exposition critique que nous allons faire des observations et des expériences de ces savants, de M. Verworn en particulier.

Pour Claude Bernard, dont l’autorité est si grande en cette matière, puisque les Leçons sur les phénomènes de la vie communs aux animaux et aux végétaux sont, au témoignage d’un physiologiste tel que W. Preyer, « le seul ouvrage moderne original qui embrasse toute la physiologie générale », — pour Claude Bernard, l’étude des « êtres protoplasmiques qu’on trouve au fond des mers, et dont on ne peut dire s’ils sont animaux ou végétaux », servirait surtout à montrer la vie « à l’état de nudité ». Mais ailleurs Bernard déclare que, contrairement à l’opinion reçue, la physiologie des animaux supérieurs est la clé de la physiologie de tous les autres, car c’est