Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXVIII, 1889.djvu/680

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
670
revue philosophique

R. Pasquinelli. Les notions du droit et de l’État dans la civilisation et dans la philosophie avant Socrate. — L’auteur fait la part de ce qui, dans l’institution de ces idées, était dû à la nature humaine, à la tradition antérieure, aux circonstances physiques. Tandis que dans la civilisation orientale l’homme n’était qu’un mode de la substance universelle et n’existait pas comme personne, en Grèce, l’homme se détache de la nature extérieure, et trouve son indépendance comme personne consciente, son unité dans l’État. L’histoire de l’État grec se développe au milieu du contraste des deux principes opposés de la vie de l’État, l’objectif et le subjectif, qui correspondent aux deux plus caractéristiques éléments du peuple grec, le dorien et l’ionien. Les Spartiates furent plutôt des citoyens, les Athéniens furent quelque chose de mieux, ils furent plus hommes. Mais, chez eux aussi, quelque conscience qu’ils eussent de leur spontanéité et de leur liberté, celles-ci furent regardées comme une émanation de l’État. Les premières réflexions sur les grands problèmes de la vie morale et politique ne commencèrent en Grèce qu’au vie siècle avant J.-C., avec les sept sages. Thalès, le père de la philosophie grecque, fut aussi le père de la politique. Aux idées spéculatives d’Héraclite correspond sa doctrine pratique sur l’État. Le travail se continua de diverses façons, avec les autres philosophes pratiques, Anaxagore, Archélaüs, Pythagore, etc.

V. Benini. L’avenir de l’esthétique. — (Réponses aux objections présentées dans le compte rendu des Périodiques du mois de mai.) L’esprit d’observation scientifique est opposé à celui de l’observation artistique ; mais l’art subit les influences de la science, et en est fécondé. La science est poésie, même pour le savant. Le poète, le romancier peuvent faire de la psychologie sans le savoir ; mais ils peuvent avoir intérêt à l’apprendre, et d’ailleurs ne la respirent-ils pas dans l’air ambiant, quand les philosophes la font à côté d’eux ? Un champ, pour le peintre, n’est pas dépouillé de tout, bien qu’il soit très parcouru et cultivé. Tous les engins, tous les travaux sociaux n’enlèvent pas leur poésie à la nature, et ils comportent une certaine sorte de poésie morale et sociale. L’architecture utile a par là même sa beauté, n’eût-elle que celle-là, ce qui n’est pas le cas de toutes nos constructions modernes. Venons à la poésie. L’épopée est morte, sous ses anciennes formes ; la science ne permet pas le merveilleux. Mais les sentiments qui relèvent de l’épopée vivent plus jeunes que jamais. L’héroïsme, l’esprit de sacrifice, ont changé seulement de noms. La force du drame réside dans le contraste, et quelle société fut plus riche en contrastes que celle d’aujourd’hui ! Au Roi Lear a succédé le Père Goriot. Le poète lyrique trouvera toujours de la matière pour ses chants, s’il entend le langage des choses, l’écho du sentiment humain dans la nature.

R. Benzoni. Renaissance de la métaphysique en Italie. — Elle est suffisamment prouvée par les savants Mémoires de L. Ferri et par la dernière et importante publication d’Angiulli. Pour l’un comme pour