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L’ART CHEZ L’ENFANT


Depuis une dizaine d’années, un certain nombre d’observateurs nous ont donné soit des esquisses biographiques, soit des ouvrages généraux intéressant la psychologie de l’enfant. Les travaux de M. Taine, de Darwin, de Preyer sont bien connus chez nous. Nul, si ce n’est M. Bernard Pérez, n’a fait de la psychologie de l’enfant son domaine propre. M. Pérez s’est cantonné dans cette partie de la science peu explorée avant lui, il nous a donné successivement les Trois premières années de l’enfant, l’Éducation dès le berceau, l’Enfant de trois à sept ans, sans compter deux brochures sur Tiedemann et Jacotot, et tout récemment il vient de publier sur le même sujet un nouveau volume, l’Art et la Poésie chez l’enfant, dans lequel nous trouvons beaucoup d’anecdotes joliment contées, des citations heureusement choisies, de charmants récits écrits par des confidentes de M. Pérez sur leurs souvenirs d’enfance, des documents assez curieux et des considérations fines et justes. On y trouve une bonne occasion de réfléchir aux débuts de l’activité esthétique, et l’auteur ayant évité de formuler des conclusions trop précises, nous n’en sommes que plus à l’aise pour en trouver qui nous plaisent, si c’est notre goût d’en chercher.

Il en est de l’activité esthétique comme de bien d’autres choses, elle est difficile à reconnaître à ses débuts ; le germe ne ressemble guère à la plante. Dans bien des cas les petits faits que l’on cite nous font chercher pourquoi et comment ils se rapportent à l’étude de l’art et de la poésie chez l’enfant et l’on trouve aussi que s’il n’y a pas précisément de l’art dans le mot, le geste ou la sensation de l’enfant, il n’y en a pas moins certaines des conditions de l’art, un germe qui n’est pas esthétique, mais qui n’aura qu’à se développer pour le devenir. Et la distinction entre l’émotion esthétique, la curiosité, le désir, l’appétit satisfait n’est pas assez nettement établie chez l’adulte pour qu’on