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ANALYSES.paul carus. Fundamental Problems.

générales, celles de la révolution elliptique des planètes et celles de la gravitation universelle, pour en déduire ensuite les théories des perturbations planétaires et de toutes les irrégularités de mouvement dans les corps célestes. Mais Bacon a méconnu l’emploi de la déduction dans les sciences, et le pouvoir d’inventer ou de deviner, qui appartient au génie scientifique.

Le même chapitre (cinquième) se termine par de brèves indications sur l’influence que Bacon ou plutôt un certain esprit baconien a pu avoir sur les siècles suivants. M. N. nous conduit d’Angleterre en France, pour revenir après en Angleterre, et retourner encore sur le continent ; il nous parle de Leibniz, puis de l’école écossaise en Écosse et en France, et enfin de Schopenhauer. Relevons seulement cette idée que tout le mouvement philosophique dans les temps modernes, même celui de Locke, de Berkeley et de Hume, même celui de Reid, vient de Descartes beaucoup plus que de Bacon, et que Hobbes lui-même n’a point de rapports avec son prédécesseur immédiat en Angleterre, mais bien avec le philosophe français. Enfin M. N., tout en avouant que Bacon est peu apprécié des logiciens purs, qu’il est la « bête noire » des spécialistes, déclare que ce n’était pas non plus son métier de faire des découvertes, et que du moins il y a puissamment excité les autres : il s’est acquitté de cette tâche avec une gravité et une élévation de langage qu’on ne connaissait pas jusque-là, et qui contrastent singulièrement avec le ton ironique de Galilée, par exemple ; aussi laissa-t-il dans les âmes une impression profonde de respect et d’enthousiasme presque religieux pour la science.

C. A.

Paul Carus. Fundamental Problems. The Method of Philosophy as a systematic arrangement of Knowledge. Chicago, 1889, 267 p.. in-12.

Ce volume est composé de petits articles parus dans The Open Court. On y trouvera l’exposé complet de la doctrine de M. P. C., qui est un monisme, on pourrait dire un monisme kantien, en ce sens que la méthode du criticisme y est souvent invoquée. L’épigraphe est déjà une déclaration de principes. M. P. C. a l’ambition de substituer : à l’agnoticisme la science positive, au mysticisme la claire pensée, au surnaturalisme et au matérialisme une conception unitaire du monde, au dogme la religion, à la croyance la foi.

« Nous ne pouvons nous empêcher, écrit-il, de chercher une conception unitaire des différents phénomènes, et notre esprit ne sera jamais en repos qu’il n’ait enfin la certitude de l’avoir trouvée. » Cette tendance même de l’esprit humain serait la condition subjective de la philosophie monistique ; la « condition objective » s’en doit trouver dans nos expériences actuelles. Le monisme n’est pas un système fini, il est le plan de construction d’un système, construction qui reposera sur