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ne ressent de fatigue à aucun moment de l’expérience. Ce pouvoir de conserver longtemps une attitude a lieu soit que la malade ait les yeux ouverts ou fermés, soit qu’on fixe son membre, à son insu, dans une attitude fatigante, ou que le sujet prenne lui-même, spontanément, cette attitude. Dans tous ces cas, la condition mentale du sujet est à peu près la même, car il n’a pas besoin de penser à son membre, et de faire un effort quelconque pour le maintenir soulevé ; il l’oublie en quelque sorte en l’air.

Chez quelques sujets, le bras anesthésique soulevé retombe immédiatement ; si on prie le sujet de le maintenir soulevé, celui-ci ne peut y arriver qu’à la condition de regarder constamment son membre ; dès qu’il le perd des yeux, le membre retombe. Ce qu’il y a de curieux, c’est que le sujet ne fait aucun effort, dans ces conditions, pour maintenir le bras dans une position déterminée ; c’est l’influence de la vision du membre qui est nécessaire à la conservation de l’attitude. Nous avons déjà signalé, dans ce travail, l’effet que produisent les excitations visuelles sur les contractions musculaires, chez certaines hystériques.

Les membres soulevés présentent parfois une flexibilité cireuse ; parfois au contraire les articulations sont le siège d’une certaine raideur, et il faut vaincre leur résistance pour communiquer aux membres une attitude quelconque.

Nous avons toujours vu ces états cataleptoïdes de la veille siéger du côté anesthésique. Lorsque nous soulevions le membre sensible, il ne restait pas en position plus de quelques minutes ; la fatigue et le tremblement survenaient rapidement ; il n’y avait donc point de catalepsie de ce côté. De plus, si on opérait le transport de la sensibilité, la propriété cataleptique était transférée en même temps.

D’après quelques observations recueillies par MM. Seglas et Chaslin sur des hystériques et des épileptiques, il paraîtrait que l’anesthésie n’est pas une condition toujours nécessaire. Ils ont observé un état cataleptoïde chez des sujets n’ayant pas une anesthésie sensitivo-sensorielle évidente. Quoi qu’il en soit, ce qui est certain, c’est que chez les sujets que j’ai pu observer, l’état cataleptoïde n’est accompagné ni d’un sentiment d’effort, ni d’un sentiment de fatigue. Cette absence d’impressions subjectives physiologiques démontre évidemment que l’état cataleptoïde est sous l’influence d’une altération de la sensibilité. Il n’est pas impossible que cette altération de la sensibilité se produise momentanément dans un membre sensible.

L’absence de la sensation d’effort et de fatigue nous est d’abord attestée par le témoignage du sujet, qui ne sent pas son membre