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Psellos : mais c’est le seul nom connu. Rien, ou presque rien ne vint de Constantinople en Occident, du moins’avant les croisades.

Dans l’empire d’Occident, en Italie et en Gaule, bientôt appelée France, la culture grecque avait été presque abandonnée, ce qui reste en philosophie, ce sont des ouvrages latins, Lucrèce, Cicéron et les Pères, surtout saint Augustin, la principale source du platonisme en Occident. Quelques grands noms surnagent, entre autres ceux de Boèce et Cassiodore, ministres l’un et l’autre du roi Théodoric ; le premier, dont les travaux sur Aristote et sur l’Isagoge de Porphyre sont la base de toute la philosophie du moyen âge. Boèce et Théodoric, en tant que celui-ci encouragea l’étude des lettres : voilà les seuls chaînons que nous trouvions entre l’antiquité et le moyen âge.

On sait combien il a fallu de temps pour que les études recommençassent en France. Grégoire de Tours disait : Væ diebus nostris quia periit studium litterarum à nobis. Le mouvement reprit sous Charlemagne par la fondation de l’école du palais, et par les soins d’Alcuin. La même école se continua sous les auspices du successeur de Charlemagne, Charles le Chauve, à la cour duquel vivait l’Écossais Scot Erigène, véritable prodige pour son temps. Vers cette époque, l’Irlande et l’Angleterre (Alcuin était d’York) entrent pour leur part dans la renaissance classique, mais envoient leurs enfants au centre de l’empire franc, à Aix-la-Chapelle, où résidait Charlemagne et où il avait fondé son école. Ainsi peu à peu l’Occident barbare s’éveillait à la vie de l’esprit ; commençant par la grammaire, comme les enfants, il allait bientôt s’élever à la logique et de là à la métaphysique et à toutes les parties de la philosophie. C’est seulement à la fin du xie siècle que recommence véritablement la philosophie proprement dite. Voyons ce qu’on possédait à cette époque en philosophie. Nous l’avons dit déjà, rien ou presque rien des écrits grecs. La langue grecque était en grande partie ignorée. Scot Érigène savait le grec : mais c’était une rare exception. Lui-même ne paraît avoir connu de Platon que le Timée. Il connaissait aussi Denys l’Aréopagite. On cite encore, au xiie siècle, un commentaire du Timée par Guillaume de Conches ; mais en général très peu de chose sur Platon, si ce n’est par l’intermédiaire de saint Augustin. Qu’avait-on d Aristote ? Rien que les ouvrages de logique, et encore traduits et abrégés par Boèce. C’est avec ces maigres documents et avec l’Isagoge de Porphyre que s’établit la première grande discussion du moyen âge. Où a lieu cette discussion ? À Paris, qui va jouer pendant plusieurs siècles le rôle d’Athènes dans la civilisation grecque.

C’est à Paris, à l’ombre de Notre-Dame, que Guillaume de Champeaux pose la thèse de la réalité des universaux. Le moine de Com-