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touchant ni plus ingénieux que le court avant-propos où il explique et justifie ce titre général de toutes les œuvres qu’il comptait publier. Par reconnaissance, il voulait les mettre sous l’invocation de ses parents, non sans espérer que la postérité se souviendrait d’eux si leur fils méritait la gloire. Noble et légitime ambition.

Gomez Pereira avait un frère et un neveu qui connaissaient l’Amérique. Il invoque leur témoignage à propos des croyances et des pratiques religieuses des peuplades indiennes du Nouveau-Monde. Il avait une sœur mariée, dont le mari a fourni l’observation la plus curieuse peut-être de son traité de médecine. Il vaut la peine de la rapporter dans ce recueil ouvert aux médecins qui aiment la philosophie, et aux philosophes qui ne dédaignent point la médecine. La voici littéralement traduite : « L’expérience m’a appris que la fièvre quarte survenant chez un épileptique peut le guérir de son mal. Un bourgeois de bonne famille, Louis Alvare Escobar, époux de ma sœur Anne Pereira, était épileptique depuis vingt-deux ans. Il fut délivré de l’épilepsie par une fièvre quartaine qui dura à peu près toute une année. C’est un fait connu de tous les habitants de notre ville. Ce ne fut pas immédiatement après la cessation de la fièvre quarte que les attaques épileptiques disparurent définitivement. Pendant deux ou trois ans, il fut encore sujet à quelques attaques, mais très légères. À la fin, ce mal cruel disparut tout à fait, et aujourd’hui, délivré de ces deux maladies, dans sa cinquantième année, il est plein de santé, et beaucoup plus jeune qu’à l’âge de quarante ans. » Sans être unique, ce cas est au nombre des plus rares. Un autre fait clinique très curieux est celui d’un adulte qui, à la suite d’une plaie béante du crâne, eut une hernie du cerveau que le chirurgien eut beaucoup de peine à réduire malgré de longues et pénibles manœuvres. Cependant le patient guérit sans accident ni complication, et ce qui est encore plus remarquable, sans le moindre symptôme de fièvre.

À propos de la fièvre d’éreintement, qu’on appelle aujourd’hui la fièvre des surmenés, il rapporte une observation personnelle, qui ne manque point d’intérêt. Mandé à Madrid où se trouvait alors l’empereur avec son fils, il se mit en route vers le soir et pressa sa monture. Arrivé au bourg d’Arevalo, à six lieues de Medina del Campo, il fut pris d’un horrible frisson, suivi de fièvre en se mettant au lit. Craignant une maladie grave, il songeait à rentrer chez lui. S’étant endormi, il se réveilla deux heures avant l’aube et, se trouvant mieux, fit seller les chevaux pour continuer son voyage, au grand ébahissement de son valet. Et le pied à l’étrier, il lui dit : « Pressons le pas, comme la veille, car je me sens bien plus dispos