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IV. La moralité n’a qu’une valeur relative et subordonnée. Il y a quelque chose de supérieur à elle, c’est la recherche de la plus haute perfection que l’humanité puisse atteindre ; et quand les prescriptions morales détournent de ce but idéal, ce qui a une valeur pour la morale a, considéré d’un point de vue supérieur, moins de valeur que certains modes d’agir moralement indifférents. D’ailleurs, d’une façon générale, l’acte accompli par devoir exige un plus grand travail psychophysique que l’acte accompli par inclination, par conséquent lui est inférieur au point de vue du développement universel. L’auteur remarque que la morale contemporaine tend à se transformer précisément dans le sens qu’il vient d’indiquer, c’est-à-dire que nous nous préoccupons aujourd’hui moins d’être vertueux que de travailler au développement général de l’humanité. Il va même jusqu’à admettre que la moralité, qui n’a pas toujours existé, pourra également cesser d’exister un jour.

B.

D. José Ramon de Luanco.La alquimia en España. Escritos ineditos, noticias y apuntamientos que pueden servir para la historia de los adeptos españoles, tomo I. Barcelona, Imprenta de Fidel Giró, Cortes, 212 bis, 1889, in-16, 237 pages.

Cet élégant volume est un vrai trésor. Il renferme des documents précieux, latins, castillans, catalans, pour l’histoire de la philosophie hermétique. L’auteur, M. J. R. de Luanco, professeur de chimie à la Faculté des sciences de Barcelone, est l’homme d’Espagne qui connaît le mieux l’histoire de l’alchimie et des alchimistes espagnols. C’est lui qui a démoli primitivement la légende de Ramon Lull, alchimiste et astrologue. Un grand savoir, un solide bon sens, une exposition claire et nette où respire la bonne foi, telles sont les qualités qui recommandent les écrits de ce savant. Il a bien mérité par ses recherches de l’histoire de la médecine et de l’histoire de la philosophie. Nul n’est mieux préparé que lui à écrire l’histoire de l’alchimie en Espagne. En attendant qu’il écrive cette histoire, il en a recueilli les matériaux. Les articles contenus dans ce volume sont d’excellentes monographies où l’on voit, comme dans la comédie humaine, deux classes de personnes, les charlatans et les dupes. M. de Luanco, cédant aux instances de quelques amis, promet de consacrer ses loisirs à l’étude des œuvres d’un auteur à peu près inconnu, malgré son grand renom, Arnaud de Villeneuve. Espérons qu’il le fera connaître en exhumant ses écrits en langue catalane. Ce serait un grand honneur pour lui de restaurer la figure de ce médecin-philosophe, et un grand service rendu à la médecine historique.

J. M. G.