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ANALYSES.munsterberg. Der Ursprung der Sittlichkeit.

En résumé, malgré certaines longueurs, le livre de M. Döring présente des analyses psychologiques intéressantes, une étude assez approfondie des conditions subjectives du bonheur, une formule qui mérite examen de la solution du problème moral.

G. Belot.

Hugo Münsterberg. Der Urspruxg der Sittlichkeit. Mohr, Freiburg i. B., 1889 ; 118 pages.

La présente étude comprend quatre parties traitant : la première, des critériums ; la seconde, des antécédents (Vorstufen) ; la troisième, de l’évolution ; la quatrième, de la valeur de la moralité.

I. L’auteur reproche à ceux qui jusqu’ici ont étudié les phénomènes moraux de s’être montrés étroits en ne recourant pour la détermination du caractère moral des actes qu’à des critériums objectifs, tels que, par exemple, l’utilité qui résulte de ces actes pour l’espèce, pour l’humanité. Selon lui, le critérium décisif de la moralité est de nature subjective ; nous agissons moralement quand nous accomplissons l’action pour elle-même, sans songer aux résultats qu’elle aura, en ne nous préoccupant « que de la maxime qu’elle exprime et de la conformité ou non-conformité avec une prescription » (p. 25).

II. Cette manière de juger les actions que nous allons accomplir, en tenant compte simplement de leur accord avec des prescriptions, n’existe ni chez les animaux ni chez les peuples primitifs. Par conséquent les uns et les autres manquent de moralité véritable. L’auteur montre comment la moralité, telle qu’il la comprend, s’accompagne nécessairement chez l’homme de la conscience de la liberté. Puis, après avoir passé en revue les principales formes que revêtent ceux-là, parmi nos actes, qui peuvent être l’objet d’un jugement moral, il rattache ces actes à quatre motifs primitifs principaux : l’égoïsme, la sympathie, le sentiment du respect, la satisfaction esthétique ou l’admiration qu’on éprouve pour le courage, la force, etc. De ces quatre motifs, un seul est moral, le respect. Néanmoins, ils constituent tous ensemble les antécédents de la moralité.

III. Une apparition soudaine de la moralité est impossible. Les prescriptions (qui à l’origine ont dû se rattacher surtout à des idées religieuses) sont d’abord associées à des résultats utiles et nuisibles. Puis, par la répétition, une association de plus en plus forte se produit dans la conscience entre la crainte des châtiments et l’espoir des récompenses d’une part et les actes prescrits d’autre part ; et finalement, l’idée des résultats, c’est-à-dire de ces châtiments et de ces peines, s’efface, et la moralité apparaît. Quant aux premières prescriptions, de qui viennent-elles ? Principalement de prêtres jouissant d’une grande autorité. Enfin, une très grande répétition transforme le devoir lui-même ou la moralité en inclination et lui fait perdre sa valeur morale.