Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXVII, 1889.djvu/650

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
640
revue philosophique

éclairer davantage sur la nature de cette réalité impersonnelle qui forme le vrai sujet de tout jugement. Peut-être verrait-on, en essayant de la préciser, que la logique n’a rien à gagner à cette intrusion dans le domaine métaphysique, et que si on veut en cela suivre les errements de Hegel, il faut aller avec lui jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à la négation du principe de contradiction et à l’admission du principe du troisième survenant. Ou en effet le réel, le sujet universel, est immobile et alors comment, non pas seulement expliquer, mais admettre même les variations mobiles des apparences phénoménales, la distinction entre le sujet et l’attribut grammaticaux ? ou le réel est mobile et alors le sujet universel ayant pour essence d’être variable, la logique des contradictoires n’a plus lieu. Dans les deux cas, le jugement tel que l’entend Aristote et avec lui M. Bosanquet, ne peut en aucune façon exister.

Dans le second volume, l’auteur nous donne une théorie très intéressante de l’inférence, qu’il définit « le rapport médiat d’un contenu idéal à la réalité ». La preuve de l’inférence se trouve dans la nécessité qui unit les diverses parties du système idéal entre elles d’abord, avec la réalité ensuite. Or, pour mettre au jour cette nécessité, il faut et il suffit de montrer l’universel qui relie entre elles certaines différences exprimées dans le langage ou simplement représentées dans la pensée. Ainsi toute inférence a pour but la découverte et l’exhibition de l’universel. Il y a des modes d’inférence qui donnent à cette exhibition une évidence indéniable, ce sont les syllogismes ; il y en a d’autres qui découvrent l’universel sous les différences, mais qui ne parviennent pas à établir son existence d’une manière tout à fait satisfaisante, telles sont l’induction et l’analogie.

M. Bosanquet n’adopte pas cette division si simple, il ne croit pas devoir faire une théorie du syllogisme. Il estime sans doute qu’après Aristote et Hamilton il n’y a plus rien à faire de ce côté. Il a l’air d’ignorer la théorie si intéressante de M. Lachelier publiée dans la Revue (mai 1867) et que M. Lachelier a résumée à l’usage des étudiants dans la Logique de M. Rabier. Il traite successivement de l’induction par énumération qu’il ramène à la troisième figure du syllogisme, du raisonnement mathématique, de l’analogie qu’il ramène à un mode non concluant de la deuxième figure du syllogisme, de l’induction scientifique et enfin de la subsomption, qu’il ramène à la première figure du syllogisme.

Notre auteur attribue donc une fonction spéciale à chacune des trois figures du syllogisme. D’après lui, l’induction par énumération incomplète se ramène à un syllogisme de la troisième figure, ce qui prouve que cette sorte d’induction ne peut aboutir à des formules vraiment scientifiques et universelles, puisque la troisième figure ne peut donner que des conclusions particulières. D’après M. Bosanquet, l’analogie prendrait de même naturellement la forme d’un syllogisme de la seconde figure, ce qui établirait par là même le peu de valeur