Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXVII, 1889.djvu/637

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
627
ANALYSES.crépieux-jamin. L’écriture et le caractère.

dont ont fait usage les vrais métaphysiciens, de Platon et Aristote à Leibniz en passant par saint Thomas.

Il est aisé de voir aussi que la solution de M. Dubuc n’est pas faite pour nous satisfaire. Nous l’avons dit plus haut : de l’idéal on ne pourra jamais tirer que l’idéal et non le réel, de la forme pure on ne parviendra jamais à déduire une existence quelconque. Le style seul du dernier chapitre suffirait à donner l’éveil sur la valeur des idées qui y sont exprimées. La pensée partout ailleurs aisée et claire devient embarrassée, pénible et obscure. Il y a des longueurs et même des défauts de composition qui se remarquent d’autant mieux que les autres chapitres sont très précis et bien disposés. Et en effet comment de ce que nous pouvons choisir entre trois hypothèses, l’inconcevabilité, la conception sans réalité, et la réalité sans connaissance de l’absolu (p. 233), et qu’en même temps nous avons la conception de la perfection, est-il possible de conclure que cet absolu qui peut n’être pas réel, qui peut même n’être pas pensé doit trouver son essence dans la perfection ? À tout le moins fallait-il éliminer l’hypothèse de Hamilton et celle de Kant pour conserver celle de M. Spencer. Et, si l’on admet la valeur du procédé critique, comment peut-on accorder la moindre créance aux raisonnements d’après lesquels la matière de la connaissance correspond à un objet externe réel ? Si le principe de causalité ne vaut pas pour prouver Dieu, pourquoi vaudrait-il pour prouver le monde ? Et si le principe de causalité n’a pas de valeur, pourquoi le principe de substance en aurait-il une ? Comment alors la conscience réfléchie peut-elle poser l’existence et la substantialité du moi ?

En résumé donc M. Dubuc a eu raison d’attirer l’attention sur la question capitale de la méthode en métaphysique. Il a courageusement ouvert une voie qui peut être féconde ; la plupart de ses chapitres sont excellents ; mais il a négligé d’étudier la méthode qu’ont suivie tous les vrais métaphysiciens. Constatant l’anarchie philosophique actuelle, il n’est pas remonté jusqu’à l’époque où cette anarchie n’existait pas, surtout il a voulu en dehors de toute logique faire sortir le réel des abstractions du criticisme. La méthode critique purement formelle ne peut que ruiner la métaphysique ; le seul être qu’elle puisse jamais tolérer, ce n’est pas l’Être suprême, immobile et éternel, c’est l’être le moins être, le plus mobile et le plus fugitif des êtres, c’est-à-dire le phénomène. Le vrai disciple de Kant, ce n’est pas M. Dubuc, c’est M. Renouvier.

G. Fonsegrive.

J. Crépieux-Jamin. — L’écriture et le caractere. Paris, F. Alcan, in-8o de 311 pages, avec 116 figures dans le texte, 1888.

Sous ce titre, le nouveau livre de M. Crépieux-Jamin n’est à vrai dire qu’une seconde édition du Traité pratique de graphologie dont