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ANALYSES.p. dubuc. La méthode en métaphysique.

conscience puisse atteindre autre chose que le relatif et il traite d’« idolâtrie psychologique » le système de Fichte qui a voulu « faire du moi le principe des choses, engendrant l’univers par son activité infinie » (p. 179).

Quoi qu’il en soit, nous avons déjà atteint un des noumènes métaphysiques, le moi, à la fois dans son existence et dans son essence. Il ne nous reste plus qu’à trouver la méthode qui nous permettra d’atteindre les deux autres, le monde et Dieu. La méthode a priori ou spéculative se présente à nous. Cette méthode a deux procédés, le procédé dogmatique et le procédé critique. Examinons-les tour à tour. — La méthode a priori consistant, d’après M. Dubuc, à s’appuyer sur la raison pure pour construire la métaphysique, le procédé dogmatique considère la raison pure comme douée d’une intuition propre, dont le contenu plus ou moins riche varie d’un système à l’autre (p. 187) ». On croit alors que la raison nous donne une intuition de l’absolu et on se place d’emblée au sein de cet absolu pour en déduire la diversité des choses. Or, continue M. Dubuc, suivant en cela M. Spencer, la raison ne peut nous donner que des symboles et non des intuitions de l’absolu et, ce qu’il y a de plus grave, tous les symboles qu’elle peut nous en fournir sont illégitimes et contradictoires. Les trois seuls systèmes de métaphysique dogmatique sont le matérialisme, le panthéisme et le théisme spiritualiste. Or, le matérialisme qui conçoit l’absolu par voie d’analogie sur le type de la matière inerte est absurde, ainsi que le panthéisme, qui conçoit l’absolu par voie d’analogie sur le type des êtres vivants ; et le théisme, qui conçoit l’absolu par voie d’analogie, sur le type d’un artisan, n’est pas moins absurde que les deux autres systèmes. À cette critique empruntée à M. Spencer, l’auteur ajoute encore cette remarque que le théisme spiritualiste conçoit l’absolu sur le type du moi humain et il conclut : « En résumé, les diverses tentatives du dogmatisme pour découvrir par voie d’intuition l’être par soi aboutissent inévitablement à un symbolisme dont les matériaux sont empruntés ou à l’expérience externe, ou à l’expérience interne, ou aux deux réunies. Que ce soit la matière ou que ce soit l’être vivant ou le sujet pensant qui serve à la définition du premier principe de la réalité, toutes les hypothèses métaphysiques offrent la contradiction permanente de l’absolu identifié au relatif (p. 201). » M. Dubuc fait cependant quelques réserves sur les conclusions de la critique de M. Spencer et s’il lui accorde que les symboles précités sont illégitimes, il croit pouvoir refuser d’admettre que l’absolu est de tout point inconcevable. Il lui semble qu’on doit pouvoir distinguer l’absolu du relatif et que l’existence par soi doit alors être donnée comme le minimum de contenu dont la représentation de l’absolu ne peut se passer. Il demeure établi, selon M. Dubuc, que la méthode dogmatique ne peut arriver ni à prouver la réalité, ni même à déterminer l’essence de l’absolu. Il espère trouver dans le procédé critique le moyen de combler cette lacune et terminer ainsi, à l’aide de ce procédé, la métaphysique com-