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ses origines et son histoire. XIV. Le taoïsme, son organisation, ses croyances, son état actuel. XV. Le bouddhisme chinois, ses origines, son histoire, sa situation actuelle. XVI. Le bouddhisme chinois ; doctrines, culte, couvents et divinités bouddhistes. XVII. La religion populaire. XVIII. Le Feng-Shui (ou divination chinoise). Les conclusions de l’ouvrage se lisent au chapitre XIX et dernier, intitulé : Considérations finales, et que suivent cinq appendices consacrés à l’islamisme chinois, au judaïsme chinois, au christianisme chinois, aux Taé-Ping et aux dynasties chinoises.

On a dû se demander pourquoi M. Réville traite de « la religion chinoise » et non « des religions de la Chine ». C’est que, s’il y a diverses formes religieuses, la religion populaire est essentiellement une. « Est-ce que toutes ces fêtes publiques et privées que la multitude chinoise célèbre avec tant d’empressement sont confucéennes ? Sont-elles bouddhistes ? Font-elles partie intégrante de la religion impériale ? Évidemment non. Beaucoup sont toutes pénétrées de cet animisme exubérant que le confucéisme tient systématiquement à distance. Un plus grand nombre encore s’associent à des croyances et à des rites que le bouddhisme, même affaibli comme il l’est en Chine, ne saurait sanctionner sans renier son principe. Ce qui n’empêche pas une grande quantité de Chinois de recourir en nombre d’occasions aux bons offices du clergé bouddhiste… Mais comme ils vivent et adorent ostensiblement sans aucun scrupule d’une manière très peu conforme aux enseignements de Bouddha, on ne peut pas dire que ce soit là une religion nationale. On pourrait plutôt dire que la religion populaire en Chine est taoïste parce que le taoisme, profondément oublieux du Tao de Lao-Tseu, son fondateur malgré lui, s’est donné des cadres assez élastiques pour embrasser tout ce qui est tradition, légende, culte local, régional ou national. C’est une religion à tout croire. Cependant ce serait une erreur profonde de la considérer comme la religion chinoise proprement dite, etc. » Cette discussion est intéressante et nous imaginons qu’on pourrait de même discuter s’il y a une ou plusieurs religions dans l’Inde. En réalité, c’est une affaire sans grande importance. Dans tous les pays où sont pratiqués différents cultes, l’étranger sera frappé de voir certains côtés communs à tous, surtout s’il cherche de préférence ses renseignements dans l’usage populaire.

M. Réville tranche par l’affirmation la question souvent débattue de savoir si la Chine est, oui ou non, une nation religieuse, si, sous l’encombrement des pratiques, subsistent le sentiment de l’adoration et la poursuite d’un idéal. Toutefois il l’entend en un sens assez restreint, déclarant que la religion simplifiée par l’esprit confucéen, avant et après Confucius, ne fut qu’un naturisme émasculé et un animisme assagi, ce qui semblera assez maigre et justifiera une expression dédaigneuse que nous trouvons un peu plus haut : la Chine est religieuse à sa manière. Toutefois le peuple serait demeuré beaucoup plus près de l’ancien animisme avec ses sorciers, ses exorcistes, ses amulettes et ses fétiches.