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vergente de la matière avec la sensation. La matière est l’objet, le multiple, la sensation est toujours l’unification dans le sujet. Dans les citodes et les cellules commence la mémoire, parce que les forces incidentes, après avoir passé par leur centre, divergent du côté opposé et laissent dans les granules voisins et dans les membranes une petite trace.

Les plus simples animaux sont poussés à faire attention aux circonstances nouvelles, pour n’être pas détruits. Les espèces qui se sont perfectionnées, aussi bien dans le type vertébré que dans les mollusques et les insectes, sont celles qui ont su rendre facile et prompte la convergence des énergies, en ramifiant un grand nombre de voies de communication entre la périphérie et le centre, pour observer les besoins et y satisfaire tout de suite.

Le cerveau résulte de la convergence répétée des courants nerveux et du sang par l’attention, qui unifie les consciences particulières dans une représentation générale, pour comparer les sensations actuelles avec les sensations passées.

Les expériences de Gley, de Mosso, de Wundt, prouvent que la convergence psychique domine l’organisme.

L’énergie vivifiante, ou nombre réel, cherche le multiple et le réduit à l’unité, non pour correspondre avec le monde ambiant, ce qui pourrait se faire et se fait sans différencier tant de qualités, mais pour saisir une grande variété à harmoniser. M. Caporali le démontre pour les sensations visuelles, pour les sensations auditives et pour les autres (pag.  411 et suiv.).

Limitée à la correspondance, la vie n’aurait pas saisi la diverse longueur des ondes lumineuses, ni la diverse sonorité que donnent les timbres, et n’aurait jamais bâti, sur ces minimes différences, les jouissances intarissables de la peinture et de la musique. Sans nombre réel, les animaux n’auraient senti que la résistance, la fatigue, la faim, la soif, les blessures, sans rien pouvoir mesurer. La vie oppose et réunit, divise et multiplie : vrai nombre réel qui crée toujours de nouvelles qualités en analysant les éléments, pour les recomposer en synthèses géniales. La tendance à faire la synthèse des excitations donne le germe de la beauté. Une qualité commence par une esquisse de synthèse et se ramifie en plusieurs espèces par la convergence et l’attention ; toutes les qualités agréables tendent à se subdiviser, à s’harmoniser et à devenir esthétiques.

L’unité de conscience générale est une action locale, par laquelle se concentrent et se comparent géométriquement figures et sons, mouvements tactiles et mouvements musculaires, en réduisant le multiple à l’un, en opposant les objets au sujet. Par l’action continuelle de l’un, elle se représente les objets multiples comme développements de sa propre série numérique, en rayonnant des causes aux effets, des substances aux accidents, des lois déjà reconnues aux faits nouveaux qui la frappent. Le nombre réel est énergie subjective qui différencie et