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précise sur l’écran, représentent ce qui se produit dans notre esprit lorsque nous passons d’une idée à une autre.

En résumant ce qui précède, nous formulons les conclusions suivantes :

1o Toute image qui se produit seule occupe le point de fixation, dans le champ de la vision mentale ;

2o Quand le point de fixation est occupé par une première image, la seconde image qui se présente est localisée dans les parties latérales et n’apparaît que dans la vision mentale indirecte ;

3o Lorsque la première image disparaît, l’image latérale tend à se substituer à la première, et vient occuper à son tour le point de fixation.

Ces faits révèlent des analogies et des différences entre le champ visuel proprement dit et le champ de la vision mentale. Les analogies sont les suivantes : il existe, dans la vision et dans la visualisation un champ, une certaine étendue d’espace, dont tous les points sont visibles simultanément ; de plus, il existe un point de fixation centrale, et des régions latérales, en d’autres termes une vision et une visualisation directes et indirectes ; enfin, la vision et la visualisation sont plus nettes et plus distinctes dans le point de fixation que partout ailleurs.

La principale différence à signaler entre le champ de la vision et celui de la visualisation consiste dans les conditions qui assignent à la sensation rétinienne et à l’image visuelle leur position dans le champ.

On sait que la projection de chaque sensation visuelle dans le champ visuel est déterminée par son signe local, en d’autres termes par le siège de l’excitation lumineuse correspondante sur la rétine. Les sensations visuelles qui sont projetées au point du champ visuel que nous fixons correspondent toujours à des excitations du centre de la tache jaune ; conséquemment le moyen que nous employons pour modifier à notre gré la position des sensations dans notre champ visuel consiste dans les mouvements que nous faisons exécuter à l’œil : c’est par ces mouvements que nous amenons n’importe quel objet à faire son image sur la tache jaune.

Il n’en est pas de même dans la vision mentale ; l’image ne porte pas en elle un signe local quelconque déterminant sa place dans le champ de visualisation ; ainsi que nous l’avons vu, toute image, quelle que soit son origine, peut occuper le point de fixation, si elle se présente seule dans le champ désert ; de même, si une seconde image se présente, quelle que soit encore son origine, elle sera reléguée dans les parties périphériques du champ, et n’apparaîtra qu’à la