Page:Revue philosophique de la France et de l’étranger, tome XXVII, 1889.djvu/363

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
353
BINET.la vision mentale

viduelles. Aujourd’hui, c’est impossible ; en tout cas, ces observations nous montrent que la peau anesthésique qui entoure les ilots sensibles, ou qui avoisine la ligne médiane, chez les sujets hémianesthésiques, possède des propriétés particulières ; la frontière entre la région sensible et celle qui ne l’est pas, n’est pas toujours constituée par une ligne, mais par une zone, plus ou moins large, suivant les sujets, où l’excitation n’est pas sentie, mais produit des impressions visuelles qui diffèrent de celles qu’on produit sur des parties plus éloignées de la frontière.

En général, si l’on pique la peau d’une région sensible, on ne provoque pas d’impressions lumineuses, à moins de porter l’excitation sur la limite des régions sensibles et insensibles ; dans ce cas l’excitation, quoique perçue sous sa forme tactile, est accompagnée d’une impression lumineuse faible.

Étudions maintenant les zones hypnogènes.

Si l’on explore au moyen de piqûres la sensibilité d’un membre anesthésique, on rencontre à certains endroits, variables avec les sujets, mais fixes pour chacun d’eux, des régions où la piqûre et toute espèce d’excitation mécanique produisent des taches et des points extrêmement lumineux ; les malades en sont quelquefois éblouis ; ils comparent la sensation lumineuse qu’ils éprouvent à celle d’un diamant brillant au soleil, ou de la lumière électrique. En prolongeant l’excitation, on produit le sommeil hypnotique. Ces zones ne sont pas autre chose que les zones hypnogènes que M. Pitres, de Bordeaux, a décrites pour la première fois, chez les hystériques[1].

Nous avons constamment observé que la piqûre de ces zones produit des sensations lumineuses qui éblouissent les malades. Ce phénomène est si constant que l’on peut se contenter de rechercher les points de la peau qui produisent ces sensations de lumière, pour délimiter exactement les zones hypnogènes ; la contre-épreuve est fournie par l’excitation brusque des zones, qui produit le sommeil hypnotique presque instantanément.

Les zones hypnogènes que nous avons étudiées au moyen de cette méthode sont tout d’abord celle du vertex, puis diverses zones distribuées sur les membres supérieurs.

Les faits précédents semblent démontrer que l’excitation des zones hypnogènes produit le sommeil d’une façon indirecte, par l’éveil d’images lumineuses éblouissantes. Les zones placées sur la moitié sensible du corps agissent par le même mécanisme.

  1. Des zones hystérogènes et hypnogènes, etc. Bordeaux.