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LA VISION MENTALE


La psychologie des images, et particulièrement des images visuelles, a été dans ces dernières années l’objet de recherches nombreuses et attentives qui sont presque toutes d’origine française[1]. On a utilisé à cet effet, d’abord l’observation des individus sains appartenant au type visuel, puis les rêves, les cas pathologiques et enfin les hallucinations provoquées par suggestion hypnotique.

Je vais indiquer ici un nouveau procédé d’étude, dont j’ai constaté l’existence au cours de mes recherches sur l’anesthésie hystérique. L’observation a de ces hasards : on poursuit un phénomène, on en fait lever d’autres dont on n’avait pas le moindre soupçon. Mais en réalité ce que nous prenons pour du hasard tient à la logique, à l’enchaînement caché des choses.

Je rappellerai à ce propos quel a été le point de départ de mes études sur la physiologie des mouvements chez les hystériques ; j’avais eu l’idée que, lorsqu’un hystérique écrit avec une main insensible, et ferme les yeux, son écriture doit présenter des caractères en rapport avec l’anesthésie de la main. C’était une idée a priori, je cherchai à la vérifier, et l’observation me donna tort ; l’hystérique écrit à peu près aussi correctement les yeux fermés que les yeux ouverts, alors même qu’il se sert d’une main anesthésique. Cette première observation, que je communiquai à M. Féré, nous conduisit à instituer une série de recherches sur les mouvements des membres anesthésiques ; nous avons constaté que l’excitation d’un membre anesthésique, quoique non sentie par le sujet, produit des mouvements de répétition et d’adaptation en rapport avec la nature et le siège de cette excitation[2]. Pendant ces expériences, je remarquai deux ou trois fois que l’excitation de

  1. Taine, De l’intelligence, t.  I, p. 19. — Galton, Inquiries, etc., p. 83-114. — Charcot, Maladies du système nerveux, t.  III. — Binet, Psychologie du raisonnement, ch.  ii. — Ballet, Le langage intérieur, p. 32.
  2. Arch. de physiologie, oct. 1887.