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l’intérieur des narines ne produit plus l’éternuement. L’introduction du doigt dans la bouche, jusqu’au fond du pharynx, ne produit plus de nausées ni de haut-le-cœur. On sait que l’absence de ce réflexe est un bon signe pour le diagnostic de l’hystérie. Il est curieux de noter que l’anesthésie du pharynx et de l’arrière-gorge ne s’accompagne d’aucun trouble appréciable dans les phénomènes de la déglutition.

Les réflexes vasculaires et glandulaires persistent malgré l’anesthésie. L’application d’un corps irritant sur la langue insensible est suivie de la sécrétion d’une quantité notable de salive. Une pincée de tabac introduite dans les narines exagère la sécrétion du mucus nasal. L’application d’un corps dur sur la conjonctive détermine l’écoulement des larmes.

Anesthésie des sens spéciaux. Le goût. — L’anesthésie gustative est fréquente chez les hystériques. Elle peut être générale, s’étendre à tout le champ gustatif, ou seulement limitée à quelques points. À ce sujet, il est à remarquer que la sensibilité générale peut être atteinte simultanément ou isolément, et qu’il n’y a aucun rapport nécessaire entre la distribution topographique de l’anesthésie sensitive et celle de l’anesthésie sensorielle. L’anesthésie du goût peut être totale, s’étendre à toutes les saveurs, ou seulement partielle. Ainsi une malade de Pitres ne perçoit plus les saveurs sucrées et salées, mais elle goûte encore l’acidité du vinaigre et l’amertume du sulfate de quinine.

Odorat. — L’anosmie hystérique est peut-être moins fréquente que l’anesthésie gustative ; elle peut être bilatérale ou unilatérale.

Audition. — On observe le plus souvent dans l’hystérie une surdité unilatérale et incomplète. L’expérience de Rinne montre qu’il s’agit d’une paralysie centrale de l’audition. D’après Pitres, l’ouïe peut être abolie chez des hystériques dont les muqueuses de l’oreille externe n’ont rien perdu de leur sensibilité tactile ; elle peut être intégralement conservée chez des malades dont les muqueuses de l’oreille externe sont complètement anesthésiques. M. Walton avait posé la règle contraire ; on voit que cette règle peut souffrir des exceptions.

Vision. — Les troubles hystériques de la vision sont trop connus pour que nous les analysions en détail. L’amaurose est rare. On observe plus fréquemment l’amblyopie. L’auteur étudie successivement l’achromatopsie, les modifications du champ visuel, l’asthénopie, la polyopie monoculaire. Arrêtons-nous un moment sur la vision binoculaire : certaines hystériques n’y voient bien que d’un œil ; de l’autre œil, elles distinguent à peine le jour de la nuit. On place devant leurs yeux une boîte de Flees, au fond de laquelle sont placés deux points de couleur différente, l’un à droite, l’autre à gauche, et, par une ingénieuse disposition, le sujet voit avec l’œoil droit le point situé à gauche et vice versâ. Quand un simulateur qui prétend n’y pas voir d’un œil, l’œil droit, est placé devant cet instrument, il dira qu’il ne voit pas le point qui lui apparaît à droite. L’hystérique, au contraire, voit les deux points, le rouge et le vert. De même, si on montre un point vert à une